• Djokovic est son seul adversaire

    roland-garros-logoSouverain omnipotent du circuit, Novak Djokovic arrive en favori à Roland-Garros. S’il espère bien décrocher le dernier Majeur qui lui manque, le Serbe devra se méfier.

    Une fois n’est pas coutume, une tête dépasse des rangs à l’heure de se présenter Porte d’Auteuil pour le second Majeur de la saison, sauf que cette fois, cette tête bien que brune, elle aussi, n’est pas celle que l’on a l’habitude de voir émerger. En effet, point de Rafael Nadal bombant le torse avec une en bandoulière victoires et confiance à revendre. En cette fin de printemps 2015, l’homme qui se détache de la mêlée nous vient de Serbie et trône au sommet du classement mondial sans pitié et encore moins frisson. « Il est trop au-dessus des autres », déplore presque Guy Forget en évoquant le despote du circuit masculin. Cette année, plus que jamais, Novak Djokovic s’impose comme le grand favori du seul tournoi Majeur qui manque à son déjà coquet palmarès. L’heure est-elle venue pour lui d’enfin triompher sur cette terre qui se refuse à lui depuis tant d’années ?

    Le despote serbe veut avoir sa terre« Je suis ici avec un but précis »

    Au moment d’évaluer les chances de chacun, difficile de ne pas voir en la personne du natif de Belgrade le joueur le plus à même de soulever la Coupe des Mousquetaires au terme du tournoi. Il faut dire que le n°1 mondial évolue à un niveau de performance ahurissant depuis quelques mois. Ainsi depuis sa défaite à Shanghai en octobre dernier, il a écœuré l’ensemble de ses adversaires et s’est adjugé 7 des 9 tournois dans lesquels il s’est engagé, raflant 5 Masters 1 000, le Masters, plus un 8ème Grand Chelem avec l’Open d’Australie en janvier, ne s’inclinant qu’à Doha et Dubaï (ATP 250 et ATP 500, ndlr), soit 37 succès de rang dans les tournois principaux. C’est bien simple, rien n’y personne ne peut résister à l’équation proposé par le Serbe. Infatigable défenseur aux articulations élastiques, mur de volonté, Novak Djokovic est un tueur de sang-froid capable d’abattre n’importe qui par ses passings meurtriers. Tout en rythme, l’homme est à 28 ans un métronome à l’instinct de prédateur porté par une confiance incommensurable en ses capacités. « C’est juste une histoire de confiance. Nole a gagné tellement de matches depuis tellement de mois… », indique son coach Marian Vajda.

    « C’est évidemment très encourageant de savoir que j’ai gagné tous les grands rendez-vous depuis octobre (Bercy, Masters, Open d’Australie, Indian Wells, Miami, Monte-Carlo et Rome) en jouant mon meilleur tennis. Arriver à Roland-Garros dans ces conditions me donne de la confiance. J’ai eu cette situation particulière, spécialement ces deux dernières années, où quand j’arrivais à Paris, les gens se disaient : est-ce que c’est cette fois ou pas ? J’ai été proche plusieurs fois. Je n’ai pas réussi à le faire, mais cela ne me décourage pas. Je suis ici avec un but précis, me mettre dans les conditions pour gagner le trophée », apprécie-t-il.

    Son propre ennemi

    Serein comme DjokovicCompte tenu du niveau de jeu proposé par Djokovic depuis octobre, les observateurs ne voient guère d’adversaire au Serbe que lui-même. « Avec ce nouveau statut de favori, tout le monde sait qu’il doit gagner. Est-ce qu’il va être capable de continuer de jouer sans penser justement au trophée ? Je pense qu’il en est capable car il a trop de métier. Ce n’est pas l’adversaire le danger, c’est lui », confirme Forget, rejoint par Todd Woodbridge. « Il s’est mis une pression énorme sur les épaules à cause de ses brillants résultats. Parfois, se savoir prêt de réaliser ce dont vous rêver peut vous bouffer beaucoup d’influx. Le plus important sera de voir comment Djokovic va gérer tout ça », expose la légende australienne. Invaincu sur terre battue en 10 rencontres, Novak Djokovic se sait attendu. Favori légitime, il ne s’est pas vu aidé par le hasard et le concours de Maria Sharapova qui lui ont livré un tableau ardu.

    Nadal programmé en quart

    Nadal et Murray ne l'effaie pasSi les deux premiers tours ne devraient poser que peu de soucis, la perspective australienne au 3ème tour où devrait se présenter logiquement Tomic ou Kokkinakis, promet davantage. Un premier (petit) teste avant une montée en gamme avec Richard Gasquet ou Kevin Anderson en début de deuxième semaine. S’il parvient jusque là sans dommages, le Serbe ferait alors face à un adversaire d’un tout autre calibre puisque le sort lui a réservé la présence à ce stade soit de Grigor Dimitrov, soit plus excitant et inquiétant celle du maître des lieux et son bourreaux des trois dernières années : Rafael Nadal. Une perspective qui ne l’émeut guère. « Peu importe à quel stade je le rencontre. Si on est ensemble en quart, c'est qu'on aura déjà sorti notre meilleur tennis jusque là » et de rappeler lucide et froid qu’il a « encore quatre matches à gagner avant. » Qu’on se le dise, Novak Djokovic est en mission à paris et rien ne le déviera de son objectif suprême. Fort de sa confiance, il se sait capable d’enfin aller décrocher ce trophée, davantage qu’en 2011 quand il était arrivé invaincu Porte d’Auteuil avant de chuter, après 41 succès de rang, au terme d’une demi-finale somptueuse face à un Roger Federer étincelant. « 2011 est sans doute la meilleure année de ma carrière dans les résultats mais aujourd’hui je suis un joueur plus mature. Je préfère le joueur que je suis maintenant que celui de 2011 », expose-t-il.

    Grâce lui aussi à une série de 10 victoires en autant de matches sur terre battue ce printemps, Andy Murray fait office de candidat au titre et pourrait enquiquiner son meilleur ennemi serbe. « Je n'ai certainement jamais aussi bien joué sur terre battue. C'est clair que gagner des tournois et battre de grands joueurs de terre donne beaucoup de confiance. En fait aujourd'hui, j'ai l'impression que je maîtrise, que je sais ce que je fais sur le court », apprécie le Britannique. Problème, depuis son succès à Wimbledon en 2013, le protégé d’Amélie Mauresmo n’a plus trouvé la faille dans la cuirasse du Serbe (7 défaites de suite et 3 petits sets arrachés, ndlr).

    Federer se sait capable de le faireDans ce contexte, seul Roger Federer, logé confortablement en bas du tableau avec un horizon relativement dégagé (il attend Monfils en 8ème avant éventuellement Wawrinka, ndlr), s’oppose à la mainmise de son cadet. A 33 ans, « Sa Majesté » sait que le Serbe peut être battu, même au meilleur des 5 manches. « Il ne faut pas se laisser avoir par les médias et tous les gens qui disent qu’il est injouable. Ce n’est pas vrai. Il joue très, très bien. C’est formidable ce qu’il fait, il est en mégaforme, mais je sais que j’ai ma chance contre lui », tonne le Bâlois qui en connait en rayon question domination. En pleine forme et très décontracté, Federer devra se montrer vigilant pour éviter une sortie prématurée comme l’an passé face à Ernests Gulbis et rallier cette finale où il espère tant retrouver l’intouchable serbe qu’il n’a plus battu en Grand Chelem depuis Wimbledon 2012 (une rencontre depuis en finale de Wimbledon l’an dernier, ndlr).

    Loin de ses tracas, Novak Djokovic se concentre déjà sur sa tâche. « Je ne peux rien prévoir. Je dois juste essayer de faire ce que je fais de mieux et ne pas trop me projeter », soumet-il. Prudence est mère de sûreté.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Roland-Garros s'ouvre à ses femmes

    votre commentaire
  • Roland-Garros s'ouvre à ses femmes

    roland-garros-logoLauréate de deux des trois dernières éditions, Maria Sharapova remet son titre en jeu avec l’idée de conserver un bien arraché de haute lutte en 2014. Sur cette terre qu’elle apprécie, la Russe devra éteindre les feux nourris de rivales avides de gloire.

    Le soleil perce timidement et ses rayons viennent réchauffer cette terre encore endormie, engourdie par une longue année d’inactivité, privée de ses fidèles courtisanes, assoupie par le silence d’un quotidien monotone ayant repris ses droits sur les fracas d’une quinzaine rythmée par les cris et les larmes teintés d’ocre. Ce soleil de printemps annonce le réveil de Roland-Garros qui s’apprête à céder une fois encore, au furieux tumulte de la caravane itinérante du tennis qui pour deux longues semaines récupèrent ses quartiers à Paris sur les bords de la Seine. Alors que Cannes tire sa révérence et range paillettes et parures, la Porte d’Auteuil déroule son tapis rougeoyant, terre poussiéreuse battue par les vents de la légende où les meilleures actrices de cette année entendent inscrire leur nom et voir s’épanouir leurs ambitions, à l’image de la tenante du titre Maria Sharapova.

    Sharapova arrive lancé de RomeProlonger le règne

    En cette fin mai, la Russe revient en un endroit qu’elle affectionne chaque année un peu plus. Joueuse estampillée « surfaces rapides » à ses débuts sur le circuit en 2003, la longiligne n°2 mondiale a su apprivoiser cette terre si glissante où elle se sentait comme une « vache sur la glace ». « C’est le fruit d’une vraie évolution. J’ai progressivement développé mon jeu, mon mental pour m’adapter aux exigences de la terre battue. J’ai dû me bâtir afin d’être physiquement et mentalement prête pour être à la hauteur de l’une des surfaces les plus éprouvantes. Pour y parvenir, vous devez structurer votre jeu, vos points, adopter une façon de penser, de bouger. Cela m’a pris plusieurs années. Et j’ai pu effacer certaines de mes faiblesses », se félicite aujourd’hui Sharapova qui a fait de Roland-Garros l’un de ses rendez-vous privilégiés. En effet, c’est à Paris qu’elle a conquis 2 de ses 5 couronnes en Grand Chelem. Mieux, la native de Niagan les a coiffées au cours des trois dernières années manquant le triplé par la faute d’une Serena Williams inébranlable en 2013.

    Du haut de ses 28 ans, l’impératrice Sharapova est bien décidée à poursuivre sa domination sur les lieux et à rallier pour une quatrième année consécutive la finale parisienne. Un objectif tout à fait crédible pour la Sibérienne qui a su relever la tête ces derniers jours. Après un début de saison compliquée sur terre battue, la finaliste du dernier Open d’Australie a remis de l’ordre dans son tennis. Heureuse d’atteindre les demi-finales à Madrid alors qu’elle affirmait partir de loin, Sharapova a mis tout le monde d’accord voilà une semaine du côté de Rome. Un succès de premier ordre sur l’une des joueuses en forme du moment l’espagnole Suarez-Navarro, qu’elle pourrait retrouver d’ailleurs à l’aune des quarts de finale. En pleine confiance sur la terre parisienne, Maria Sharapova peut légitimement ambitionner réussir sa propre succession et réussir un doublé plus réalisé depuis 2007 et Justine Hénin.

    Serena a un compte à régler

    Serena Williams à la relanceUne performance que Serena Williams se ferait un malin plaisir de contrarier. A 33 ans, l’Américaine est sans conteste la principale rivale de la Russe dans sa quête terrienne. A son meilleur niveau, la n°1 mondiale est même intouchable comme elle l’a encore prouvé lors des deux dernières levées du Grand Chelem à New York puis Melbourne. A chaque fois, sur surface dur et rapide. Mais voilà, Roland-Garros se déroule sur terre, un revêtement où ses certitudes semblent s’égarer. Brillante en début de tournoi, la cadette des Williams s’était littéralement effondrée en demi-finale à Madrid contre Kvitova (6-2 6-3). Une claque attribuée à une blessure qu’elle promet résorbée. « Je me sens beaucoup mieux physiquement aujourd’hui. J’ai eu un petit peu plus de mal à me préparer que ce que je pensais, mais maintenant, je suis prête. J’ai pu et je me suis dit : c’est bon, ça va beaucoup mieux », tente-t-elle de rassurer.

    Un optimisme de rigueur pour l’Américaine qui reste sur une terrible déconvenue dans le tournoi parisien. En effet, arrivée tenante du titre l’an dernier, la n°1 mondiale avait été balayée par la puissance et la jeunesse de Garbine Muguruza. En deux petits sets, l’Espagnole d’origine vénézuélienne avait éjecté Serena dès le 2nd tour. Une défaite en forme de motivation au même titre que sa course vers les records. « Ecrire l’histoire est vraiment très motivant pour elle », lâche son entraîneur Patrick Mouratoglou qui connaît les ressorts de sa joueuse, dont le 3ème tour promet des retrouvailles endiablées avec Victoria Azarenka. Une idée que partage Martina Navratilova. « Je suis certaine qu’elle atteindra les 20 Grand Chelem. Depuis trois ans et sa défaite contre Virginie Razzano, elle a relancé sa carrière dans une nouvelle dynamique. Elle a réalisé que le temps passait et qu’elle voulait à tout pris marquer de son empreinte son sport. C’est impressionnant ce qu’elle fait à son âge (33 ans, ndlr). » Sur les traces de Steffi Graf et de ses 22 Majeurs, la femme aux 19 couronnes et 2 défaites cette saison (dont un forfait) est prête à reposer le pied sur terre et y apposer à nouveau son empreinte.

    Halep : « Je me sens bien sur terre battue »

    Kvitova veut briller à RolandDans l’ombre des deux reines du circuit, la foule des prétendantes fourbie ses armes. Placée dans la même moitié de tableau que l’Américaine (demi-finale potentielle), Petra Kvitova sait qu’elle peut tirer son épingle du jeu sur la terre française. « J’ai déjà joué les demi-finales en 2012 donc je sais que je suis capable de bien jouer là-bas. Je dois juste vraiment croire en mes chances. Je dois croire au moment où je soulève le trophée », explique la 4ème joueuse mondiale. Double lauréate de Wimbledon, la Tchèque arrive cette saison avec d’autres certitudes quant à son jeu sur ocre. Des certitudes acquises de l’autre côté des Pyrénées sur les courts de la Caja Magica de Madrid où elle a su mettre en place son jeu et laisser parler son formidable bras gauche.

    Si Kvitova se présente avec de sérieux arguments, il en va de même pour Simona Halep. A 23 ans, la Roumaine n’en finit plus d’épater par ses qualités sur le court. « Simona, elle a tout ce que donne le ciel : le talent, l’habileté, la vision », s’emporte son compatriote Ion Tiriac. Finaliste la saison passée, la protégée de Virginia Ruzici s’est, depuis, installée parmi les toutes meilleures joueuses du monde grâce à sa couverture de terrain et sa science des trajectoires. Des qualités sublimées par la terre battue. « J’aime chercher les angles. C’est aussi pour ça que j’aime la terre battue : on a le temps de réfléchir », glisse-t-elle dans L’Equipe Magazine.

    Halep est ambitieuseAu-delà de ça, la finaliste malheureuse de 2014 ne cache pas son plaisir de revenir sur la terre qui l’a « révélée ». « J'ai d'excellents souvenirs de mon parcours ici l'année dernière. J'ai joué de bons matchs cette année, j'ai acquis la certitude que je suis capable de jouer de longs matches et de passer trois heures sur le court sans perdre en concentration ou en lucidité. J'ai acquis de l'expérience, aussi (…) Je me sens bien sur terre battue en ce moment. C’est clairement une des surfaces où je me sens le plus en confiance et je sens que je m’améliore de jour en jour, à un tel point que je me sens prête pour un succès à Roland Garros cette année. » Une prétention normale d’autant que la n°3 mondiale a hérité d’un tirage clément tant Cornet, Radwanska, Makarova et Ivanovic ne présentent pas des obstacles insurmontables sur la route d’une demi-finale où l’attendra peut-être…Maria Sharapova.

    Derrière ces deux outsiders, il faudra regarder attentivement les parcours de la suissesse Timea Bascinszky placée avec notamment Kvitova, Madison Keys, révélation du dernier Open d’Australie, mais aussi Bencic ou Townsend. On n’oubliera pas non plus Andrea Petkovic, demi-finaliste surprise la saison dernière, dont le menu s’annonce copieux avec Errani, Jankovic et Wozniacki avant éventuellement Serena Williams en quarts.

    Des perspectives pour les Bleues ?

    Du côté des Bleues, la tâche s’annonce encore une fois ardue. Abonnée aux têtes de gondoles, Kristina Mladenovic a de nouveau été servie. Après Li Na, l’an passé, la Nordiste devra se coltiner la 6ème joueuse mondiale et demi-finaliste 2014 en la personne d’Eugénie Bouchard. La chance de la Française réside dans la dynamique catastrophique de la Canadienne qui n’a gagné qu’un match depuis la fin mars concédant 7 défaites. Une statistique effrayante mais dont il faut se méfier tant Bouchard a fait des Majeurs sa priorité. En effet depuis janvier 2014, cette dernière a toujours su briller à l’heure des Grands Chelem atteignant 1 quart de finale, 2 demi-finales et une finale (Wimbledon, ndlr). Malgré tout, la tricolore de 22 ans a un bon coup à jouer.

    Garcia mènera les FrançaisesDe son côté, Caroline Garcia aura plus de latitudes. Tête de série 31, la Française disposera de 2 tours pour se roder avant de rencontrer Ana Ivanovic, qu’elle a déjà dominée par deux fois cette saison à Monterrey et Indian Wells. Enfin, Alizé Cornet devra se méfier d’un premier tour piège contre Roberta Vinci. Une entrée en matière peu commode pour une Niçoise en pleine crise.  « Mon tennis ne s’est pas volatilisé ! Il y a deux semaines encore, je battais Halep (7-6 (6) 6-3 à Madrid). Il est quelque part, à moi de le trouver. Après, je suis inquiète, car je me dis: "Vais-je le trouver avec la tension qui va s’installer à Roland-Garros ?" Et, d’un autre côté, je me dis que c’est mon onzième Roland-Garros qui arrive, que j’ai l’habitude et que je vais réussir à gérer », s’interroge Cornet à qui Halep est promise en 8ème.

    Chacune à leur échelle, les meilleures actrices du circuit déborderont d’ambitions à l’idée de pouvoir soulever début juin la Coupe Suzanne-Lenglen. « L’ambition est le fumier de la gloire », écrivait en son temps le dramaturge italien Pietro Aretino.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Messi débloque la demie

    votre commentaire
  • Barcelone exulte et entrevoie Berlin

    A la faveur d’un dernier quart d’heure enfiévré, marqué par trois buts, Barcelone a pris une sérieuse option sur la qualification pour la finale de la Ligue des Champions en dominant le Bayern Munich au terme d’une rencontre prodigieuse d’intensité.

    Messi débloque la demieToutes les histoires ont besoin d’un héros, celui qui guide les siens, leur ouvre le chemin quand il est trop escarpé, trop encombré, trop sombre. Dans la douce nuit catalane, la cité façonnée par les inspirations de Gaudi s’est trouvée son héros, ou plutôt l’a retrouvée. Transi d’amour, le peuple blaugrana s’égosillait. « Messi ! Messi ! Messi ! », chantait-il, comme on loue son Dieu dans une cathédrale. Si le fantasque architecte n’est plus, fauché par un bus une journée de juin 1926, le joueur argentin a, lui, rappelé qu’il est bien vivant, que son génie n’a rien perdu de son éclat après un quart de finale atone contre Paris et que ses fulgurances dessinent toujours les contours d’un artiste invraisemblable et incontournable répondant présent à l’heure de se dresser sur la grande scène continentale. « Leo Messi fait des choses que personne ne peut reproduire. Grâce à lui, nous avons toujours la garantie d'être un peu plus proches de la victoire. Je lui tire une nouvelle fois mon chapeau. Il nous rend heureux », encensait après la rencontre son capitaine Andres Iniesta. Car plus qu’un doublé, Lionel Messi a fait basculer, dans un dernier quart d’heure abominable pour les Bavarois, le sort de cette demi-finale fabuleuse d’intensité où les deux formations se sont livrés une bataille pleine de hargne et d’engagement pour obtenir la maîtrise du ballon.

    Le choc des blocs

    Neuer maintient les siens dans le matchDans un Camp Nou ayant revêtu ses habits de gala, le FC Barcelone et le Bayern Munich avaient décidé d’imposer leur jeu respectif, fait de possession et de longues séquences de préparation. Pour cela, l’un comme l’autre réclamait le contrôle du ballon. Dès lors, la pelouse catalane devint le théâtre d’un spectacle irrespirable où chacun exerçait une pression étourdissante à son opposant dès qu’il perdait l’initiative, allant jusqu’à chasser loin dans la moitié de terrain adverse. Une débauche d’énergie considérable même pour des équipes de ce calibre qui les contraignait à jouer sur un fil et où toute erreur pouvait se payer comptant. Ainsi après 12 minutes, Suarez se jouait de l’alignement bavarois et s’en allait défier seul Manuel Neuer. L’Uruguayen tentait de propulser le ballon de l’intérieur du pied dans le petit filet opposé mais sa frappe était repoussée par la cheville du portier allemand. Comme il l’avait annoncé la veille, ce dernier marquait d’entrée son territoire avec son autorité habituelle et permettait au Bayern de ne pas sombrer.

    L'impuissance du BayernTremblant sur sa base arrière, le Bayern Munich ne désarmait pas et parvenait à surprendre la défense catalane. Sur une bonne combinaison avec Thomas Müller, l’attaquant polonais faussait compagnie à ses « geôliers » d’un soir et se retrouvait seul aux 6 mètres. Là, il se jetait pour reprendre le centre de son coéquipier mais ne parvenait qu’à effleurer le ballon. Sans le savoir, l’homme au masque venait de laisser échapper la plus belle opportunité de son équipe. Car si le Bayern Munich soutenait la bataille du milieu de terrain et sembla même prendre un ascendant physique en début de seconde période, il était incapable de se montrer dangereux. Si Thiago Alcantara offrait un relais technique intéressant sur le flanc droit, l’Espagnol ne pouvait apporter cette accélération meurtrière dont Robben a le secret, permettant de déstabiliser le bloc défensif adverse. Sans son Néerlandais et Franck Ribéry, l’attaque bavaroise ronronnait sans ressources, frappant 8 fois au but sans cadrer le moindre tir. Du jamais vu pour le club bavarois depuis 2009 et une défaite contre Bordeaux.

    Messi déchaine les enfers

    « On n’a pas joué bas parce que si tu le fais, tu finis par perdre (…) Il fallait les éloigner de notre zone »,  expliquait Guardiola. Une tâche que ses hommes réussirent à accomplir pendant longtemps mais comme il l’avouait avec fatalité : « Ils sont tellement bons qu’ils finissent par trouver les espaces. » C’est bel et bien ce qui advint. Pris à la gorge par le positionnement et l’activité des bavarois, les Barcelonais peinaient à s’installer. « C'est un match très compliqué, une demi-finale de Ligue des Champions face à un très bon adversaire », constatait Lionel Messi qui avait vu Alves échouer comme Suarez sur Neuer peu avant la mi-temps.

    Messi déchaine un quart d'heure d'enferComme souvent, c’est du numéro 10 argentin qu’allait venir le salue catalan. Virevoltant et très concerné par la tâche défensive pour laquelle il multiplia les harcèlements, le natif de Rosario allait se mettre en évidence. On jouait la 77ème minute quand Neymar s’effondra dans la surface sur un centre de Messi. L’arbitre ne bronchait pas et laissait le soin à Neuer de relancer vite sur Bernat à droite. Remarquable d’anticipation, Alves sautait dans les pieds de son vis-à-vis, se jouait de lui d’un grand pont et servait sur sa gauche Messi. D’un contrôle, l’Argentin se replaçait à 20m et armait sa frappe. Une frappe aussi limpide que soudaine. Neuer eut beau se détendre, il n’y pouvait rien. Pour la première fois de sa carrière, le quadruple Ballon d’Or, plein de hargne, trompait le portier allemand et faisait exploser un Camp Nou suffocant.

    Messi assomme Neuer et le BayernComme désarçonner par ce but, le Bayern se désunissait très légèrement. Or le moindre relâchement ne pardonne pas à ce niveau d’exigence et d’excellence. Au cœur du jeu, Busquets éliminait le premier rideau bavarois et servait Rakitic. Le Croate ne se faisait pas prier pour adresser une ouverture lumineuse à Messi dans une défense distendue. La suite se passait de commentaire. Avec une simplicité désarmante, il se jouait de Boateng d’un crochet intérieur et exécutait Neuer d’un subtil piqué qui fila embrasser les filets. A l’image de son gardien, le Bayern était à terre, impuissant face à ce démon argentin. « Un joueur comme Messi est difficile à arrêter. Parfois on gagne, parfois on perd », philosophait le gardien bavarois. « Nous avons eu la chance de marquer face à une équipe qui tient beaucoup le ballon, qui a un style similaire au notre. Nous avons eu du mal à mettre le premier, et par chance nous avons pu en marquer deux autres. C'est un excellent résultat », savourait le héros du soir qui parachevait son œuvre dans le temps additionnel.

    Neymar et Messi se congratulentAlors que les Allemands avaient jeté leurs dernières forces dans une ultime offensive, Barcelone planta un contre. Dans le rond central, Messi alertait Neymar partit dans le dos de Benatia. Le Brésilien s’approcha et crucifia sans état d’âme un Neuer médusé avant de se jeter dans les bras de son passeur dans une étreinte folle et joyeuse (3-0). En l’espace de 15 minutes, Barcelone, dans le sillage de son prodige, avait fait exploser sa bête noire qui ne méritait pareille correction au vu des efforts déployés. « Ce soir, nous avons assisté à un grand spectacle entre deux équipes qui savent jouer au football », appréciait Neymar. Loin de fanfaronner, Messi prévenait : « Maintenant, il faut aller terminer le travail à Munich, sans excès de confiance, car le Bayern est très solide à domicile. » Comme pour rappeler que cette nuit endiablée n’était qu’un chapitre dont il avait été le héros et que l’histoire n’était pas terminée.

    Christopher Buet


    votre commentaire