• L'inusable seigneur de Melbourne

    Djokovic embrasse sa bonne fortune australienne

     

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    À l’issue d’une finale harassante longue de 3h39, Novak Djokovic s’est débarrassé d’Andy Murray pour glaner son 5ème Open d’Australie (7-6 6-7 6-3 6-0). À 27 ans, le Serbe remporte son 8ème titre en Grand Chelem égalant Agassi, Lendl ou encore Connors.

    Il est fascinant de voir à quel point un match de tennis et un titre en Grand Chelem ne peut tenir qu’à un petit point, un malheureux point niché au cœur d’un affrontement aussi âpre et indécis soit-il. Finalement, voilà à quoi ça tient une place dans l’histoire du jeu. Un simple coup gagnant ou une banale faute directe. Novak Djokovic le sait plus que quiconque, lui qui a estourbi Roger Federer en demi-finale de l’US Open 2011 d’un retour vertigineux sur balle de match avant de finir par renverser la situation et d’aller glaner le titre new-yorkais.

    Le Serbe n’a également pu oublier ce revers de Rafael Nadal mourant dans le couloir à quelques centimètres de la ligne alors que le court s’était ouvert devant l’Espagnol qui menait alors 4-2 30-15 dans la 5ème manche de la plus longue finale de l’histoire en Grand Chelem que le Serbe allait finalement remporter.

    « Je ne pouvais rien faire »

    Une volée 5 étoiles« À ce niveau, quelques points peuvent tout changer comme on a pu le voir ce soir », savait Djokovic. Là encore, sa 5ème victoire à Melbourne Park s’est jouée sur un coup du destin au cœur du 3ème set. Un point, une volée magnifiquement posée de l’autre côté du filet alors qu’Andy Murray venait de tirer un passing de revers croisé. L’Ecossais ne pouvait remonter la balle serbe et voyait l’opportunité de breaker son adversaire s’évaporer. On ne le savait pas encore mais la finale venait de trouver là son dénouement. En effet, le n°1 mondial ne lâcherait plus le moindre jeu, en alignant 9 consécutifs pour asseoir son triomphe, le 5ème en 5 finale à l’Open d’Australie. Ici, sur ce tournoi qui l’a consacré, révélé puis servi de base dans son irrésistible ascension vers les cimes du tennis masculin. « J’ai commencé à frapper et à essayer d’être plus agressif en venant au filet, en écourtant les points. J’ai réussi un break important alors qu’il servait à 2-0 en sa faveur dans le 3ème set et ça m’a remis dans le match mentalement », expliquait Djokovic avec justesse.

    Les regrets d'une fin de match ratéCe tournant, Andy Murray s’en veut de ne pas l’avoir négocié comme il aurait dû, reconnaissant toutefois les mérites serbes. « Il était partout, il réussissait tout. Il mettait tous ses retours dedans, tous proches des lignes, tout le temps ! Je ne pouvais pas suivre. Ce 4e set n'a donc pas été trop frustrant pour moi. En revanche, le 3e l'a été parce que j'ai été un peu distrait par ses quelques chutes après les échanges. On avait l'impression qu'il avait des crampes et j'ai été un peu distrait par cela. Voilà ce qui me déçoit le plus, c’est d'avoir un peu perdu ma concentration 10 minutes à ce moment-là et il est revenu. Parce que franchement au 4e set, il frappait tout et tout rentrait… Je ne pouvais rien faire », analysait désabusé le Britannique qui venait de perdre sa 4ème finale de rang en Australie, du jamais vu dans l’histoire du tournoi. Si Murray étalait autant de frustration, c’est que cette rencontre dessinait une autre lutte que le score sévère des deux dernières manches (6-3 6-0) ne laisse transparaitre.

    Un set partout balle au centre

    Premier set de très haut niveau de DjokovicEn effet, le début de match se révélait au-delà des espérances. Campés en fond de court, les deux hommes engageaient l’échange sans retenu et se rendaient coup pour coup. « On a joué au chat et à la souris, comme d’habitude. Nous avons essayé de faire déjouer l’adversaire en prenant la balle au rebond, en imposant de longs rallyes, beaucoup de variété dans le jeu avec de l’effet, du slice, des amorties. Je crois qu’on a déployé chacun toute notre panoplie », assurait le n°1 mondial. Du haut de ses 27 ans, le natif de Belgrade faisait la meilleure entame. Brillant et d’une précision chirurgicale, il breakait d’entrée et s’échappait 4-1. Durant les 20 premières minutes, il ne commit qu’une seule faute directe. L’état de grâce ne pouvait durer et ce diable d’Ecossais profitait des tremblements étranges de la main de Djokovic pour s’exprimer et recoller. Les échanges étaient âpres et intenses et les deux hommes allaient avoir recours au tie-break pour décider du sort de ce premier acte. Tournant à 4-2 en sa faveur, Murray s’égarait. À l’affût, son adversaire sautait sur l’occasion de mener une manche à rien (7-6) après 1h12 de lutte (!). Un avantage pas neutre quand on sait que l’héritier de Fred Perry n’a jamais battu son rival belgradois après avoir laissé filer le premier set.

    Murray revient dans le matchCette perte avait le don d’énerver un Andy Murray d’autant plus bougonnant et grimaçant qu’il ne parvenait à confirmer son break acquis d’entrée de seconde manche. « J’ai mené un set à zéro avec un break d’avance dans le deuxième avant de perdre mon service. Il a commencé à être plus agressif, à mieux jouer.», convenait Djokovic. Mis en difficulté par les prises de balle plus précoces de son adversaire, il était repoussé en défense. Contrairement à la demi-finale décevante entre Wawrinka et Djokovic, ce duel voyait les deux hommes évoluer à leur meilleur niveau de concert. Aussi le spectacle s’en ressentait avec de longs échanges où chacun tentait de se rapprocher des lignes et d’entrer dans le court pour désarçonner l’adversaire. « Chaque point était une vraie bataille », confirmait le Serbe. Comme lors du premier acte, ils allaient s’expliquer au tie-break. Cette fois, Murray ne tremblait pas et  finissait par faire céder le n°1 mondial à l’image de ce dernier passing retombant dans les pieds d’un Djokovic s’essayant au service-volée. Après 2h32, les deux champions jouaient les yeux dans les yeux.

    Le soulagement du seigneur de MelbourneCependant, la débauche extrême d’efforts consentis dans ces deux manches intenses, allait se payer. Comme un pantin désarticulé, Djokovic était le premier à montrer des signes de faiblesse, chancelant et chutant sur le court comme un pantin désarticulé. « Je me suis senti très fatigué et j’avais besoin d’un peu de temps pour récupérer. C’est ce que j’ai fait », dévoilait Djokovic rejetant tout idée de crampes. La suite fut limpide. À 0-2 30-40, le Serbe écartait la menace et les derniers espoirs écossais. « Je fais ce sport, vous savez, pour gagner des titres », glissait l’incontestable patron du circuit qui retrouvait « Sa » couronne australienne, la 5ème à une unité du record de Roy Emerson, ôtée l’an dernier par Stan Wawrinka dont l’intendance n’aura finalement pas duré. À 27 ans, Novak Djokovic ne cesse de prouver qu’il a l’étoffe des plus grands, l’enfant de Belgrade autoproclamé inusable Seigneur de Melbourne.

    Djokovic-Murray, champions 2015

    Christopher Buet


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