• Bouchard, fin de détresse ?

    Bouchard trahit par son physique

    Wimbledon (1)Empêtrée dans une saison 2015 cauchemardesque, Eugénie Bouchard débarque sans aucune certitude à Wimbledon. Un an après sa première finale en Grand Chelem, la Canadienne a beaucoup appris et espère renouer avec le succès qui la fuit désespérément.

    C’est comme tomber dans un trou, un trou si profond que l’on n’en voit pas le fond. Une chute interminable, presque sans fin où tout contrôle a disparu et toute lutte semble vaine. Un an après avoir tutoyé les sommets du jeu, ici même, sur le Centre Court du plus auguste des tournois de tennis du monde, Eugénie Bouchard n’en finit plus de dégringoler dans une confondante médiocrité. A croire que les coups assénés avec une violence inouïe par Petra Kvitova et son bras de foudre en finale ont brisé plus qu’un rêve. Quelque chose a cédé, là sur ce gazon et les courts commencèrent à se dérober sous les pieds de la Canadienne en même temps que son jeu se délitait et avant que son physique ne la trahisse. C’était la semaine dernière, ultime péripétie d’une descente aux enfers.

    Bouchard est dans le durEngagée à Eastbourne, Bouchard était contrainte à l’abandon face à la future lauréate Belinda Bencic, en raison de douleurs aux abdominaux. « Je déteste abandonner pendant un match mais je n’avais pas le choix. En fait, j’aurais dû quitter la rencontre bien avant », regrettait-elle avant d’ajouter « C’était devenu insupportable. J’avais peine à servir convenablement. Je me suis dit qu’il ne fallait pas prendre de risque, surtout à l’approche d’une compétition aussi importante que Wimbledon. » Un problème qui survenait alors même que la 12ème joueuse venait de remporter la veille son premier match depuis plus d’un mois. Le point d’orgue d’une saison placée sous le signe du désastre.

    Un rude apprentissage

    Il paraît loin le temps où la Québécoise terrorisait ses adversaires arrimée à sa ligne de fond en les asphyxiant dès le retour de service. Lionne féroce et rugissante, mue par le désir de conquérir les sommets et de marquer son territoire. Le plus dur commençait pourtant car toute conquête est plus aisée que toute pérennisation. Si son retour en Australie laissait augurer de sa nouvelle place dans la hiérarchie mondiale avec un quart de finale consécutif à sa demie de 2014, la suite allait s’avérer déplaisante. Attaquée sur tous les fronts, elle ne parvenait à conserver son agressivité et enchaînait les défaites. Ainsi depuis l’Open d’Australie, Bouchard affiche un bilan ahurissant de 4 victoires en 15 matches. « Au début, j’étais très impatiente. J’espérais que cette année serait comme la précédente et même meilleure. Mais à regarder comment ça se déroule, je dois admettre que ce n’est pas brillant. Je suis dans un creux. Tout le monde me disait que ça allait arriver et visiblement je suis en plein dedans. C’est dur mais j’ai réalisé que je devais accepter cette situation, accepter que tout ne se passe pas bien en ce moment », tente aujourd’hui d’expliquer la joueuse de 21 ans.

    « Garder la tête haute »

    Sumyk a du travail pour rétablir GenieUne lucidité qui en dit long sur la maturité acquise par Eugénie Bouchard depuis plusieurs mois. Mais si comprendre est chose, elle n’est pas résolue à abdiquer. Bien au contraire. Malgré sa jeunesse, l’ancienne protégée de Nathalie Tauziat appartient à la caste des championnes et en possède le caractère. « Je déteste perdre mais je suis convaincue que je vais surmonter cette période néfaste. J’imagine que ça fait partie de mon apprentissage. Il faut garder la tête haute et surtout éviter d’être découragée », raisonne « Genie » avec sagesse. Patience est mère de vertu après tout, encore plus quand sa carrière n’en est qu’à ses balbutiements.

    Un douloureux apprentissage partagé avec son nouveau coach, Sam Sumyk. En effet, en perte de vitesse en fin de saison dernière, Bouchard choisissait de mettre un terme à sa collaboration avec Nick Saviano qui l’accompagnait depuis ses 12 ans. Une rupture nécessaire à en croire la principale intéressée. « Je n’ai aucun regret. Ce changement était inévitable. Bien sûr, la décision a été dure à prendre, mais elle devait être prise pour le bien de ma carrière », assure-t-elle. En février dernier, elle officialisait le recrutement du Breton, jusqu’alors aux côtés de Victoria Azarenka. Un professionnel accompli et reconnu qui avait mené la Biélorusse jusqu’à la place de n°1 mondiale et la conquête de 2 Majeurs à l’Open d’Australie. Un choix fort qui a nécessité de la patience. En effet, si les résultats tardent à se matérialiser, c’est parce que la phase d’apprivoisement a été plus longue que prévu. « Il m’a fallu presque deux mois pour communiquer efficacement avec Sam, mais enfin nous y sommes parvenus », dévoile la Québécoise.

    Souvenirs et ambitions

    Bouchard se refuse au marasmeUne bonne nouvelle à l’heure de revenir à Wimbledon. « C’est tellement spécial pour moi de me retrouver ici. J’ai eu le privilège de participer à la finale l’an dernier, et cette performance restera à jamais gravée dans ma mémoire », dit-elle non sans excitation. Un souvenir encore vivace dans son esprit et sur lequel elle va s’appuyer pour construire son tournoi. « Récemment, j'ai repensé à ces semaines (à Wimbledon l'an dernier) et je me suis rappelée de mes bons souvenirs. Je me suis demandé ce que je faisais de si bien à ce moment. J'étais dans ma bulle. J'ai repensé à ce sur quoi je me concentrais et je vais retenter l'expérience afin de jouer mieux », prévient l’ancienne 6ème mondiale. Un relâchement qu’elle devra couplée à une intensité et une exigence de tous les instants. « Eugénie a toutes les qualités pour atteindre le très, très haut niveau, et quand je parle de très haut niveau, je parle du haut de la pyramide », croit Sumyk.

    Placée dans la partie basse de tableau, « Genie » a été relativement épargnée pour son entrée en lice avec la qualifiée chinoise Ying-Ying Duan (117ème), une joueuse puissante mais pataude. Une formalité normalement sauf que la Canadienne n’a gagné que 2 rencontres depuis mi-mars et souffre encore de l’abdomen. Qu’importe les douleurs, Bouchard se donnera corps et âme. « Je jouerai quoi qu’il arrive, même si je suis sur une jambe », martèle-t-elle. Une attitude volontaire qui pourrait l’amener à passer quelques tours surtout si elle arrête de se saborder comme le regrette Hélène Pelletier. « Quand tu es une des meilleures mondiales, tu ne donnes pas ce genre de points sans livrer une bataille de tous les instants ! », écrit pour RDS l’ancienne joueuse canadienne. Avant d’envisager retrouver Madison Keys au 3ème tour, Makarova (8èmes) ou Kvitova en quart, il faudra remettre de l’ordre dans son jeu et sa tête. « Là où se trouve une volonté, il existe un chemin », disait Winston Churchill. Eugénie Bouchard n’en manque pas et puis il faut bien s’arrêter de tomber un jour et finir par se relever. Quel plus beau jardin que celui de Wimbledon pour reprendre pied.

    Christopher Buet


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