• Roland-Garros s'ouvre à ses femmes

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  • Roland-Garros s'ouvre à ses femmes

    roland-garros-logoLauréate de deux des trois dernières éditions, Maria Sharapova remet son titre en jeu avec l’idée de conserver un bien arraché de haute lutte en 2014. Sur cette terre qu’elle apprécie, la Russe devra éteindre les feux nourris de rivales avides de gloire.

    Le soleil perce timidement et ses rayons viennent réchauffer cette terre encore endormie, engourdie par une longue année d’inactivité, privée de ses fidèles courtisanes, assoupie par le silence d’un quotidien monotone ayant repris ses droits sur les fracas d’une quinzaine rythmée par les cris et les larmes teintés d’ocre. Ce soleil de printemps annonce le réveil de Roland-Garros qui s’apprête à céder une fois encore, au furieux tumulte de la caravane itinérante du tennis qui pour deux longues semaines récupèrent ses quartiers à Paris sur les bords de la Seine. Alors que Cannes tire sa révérence et range paillettes et parures, la Porte d’Auteuil déroule son tapis rougeoyant, terre poussiéreuse battue par les vents de la légende où les meilleures actrices de cette année entendent inscrire leur nom et voir s’épanouir leurs ambitions, à l’image de la tenante du titre Maria Sharapova.

    Sharapova arrive lancé de RomeProlonger le règne

    En cette fin mai, la Russe revient en un endroit qu’elle affectionne chaque année un peu plus. Joueuse estampillée « surfaces rapides » à ses débuts sur le circuit en 2003, la longiligne n°2 mondiale a su apprivoiser cette terre si glissante où elle se sentait comme une « vache sur la glace ». « C’est le fruit d’une vraie évolution. J’ai progressivement développé mon jeu, mon mental pour m’adapter aux exigences de la terre battue. J’ai dû me bâtir afin d’être physiquement et mentalement prête pour être à la hauteur de l’une des surfaces les plus éprouvantes. Pour y parvenir, vous devez structurer votre jeu, vos points, adopter une façon de penser, de bouger. Cela m’a pris plusieurs années. Et j’ai pu effacer certaines de mes faiblesses », se félicite aujourd’hui Sharapova qui a fait de Roland-Garros l’un de ses rendez-vous privilégiés. En effet, c’est à Paris qu’elle a conquis 2 de ses 5 couronnes en Grand Chelem. Mieux, la native de Niagan les a coiffées au cours des trois dernières années manquant le triplé par la faute d’une Serena Williams inébranlable en 2013.

    Du haut de ses 28 ans, l’impératrice Sharapova est bien décidée à poursuivre sa domination sur les lieux et à rallier pour une quatrième année consécutive la finale parisienne. Un objectif tout à fait crédible pour la Sibérienne qui a su relever la tête ces derniers jours. Après un début de saison compliquée sur terre battue, la finaliste du dernier Open d’Australie a remis de l’ordre dans son tennis. Heureuse d’atteindre les demi-finales à Madrid alors qu’elle affirmait partir de loin, Sharapova a mis tout le monde d’accord voilà une semaine du côté de Rome. Un succès de premier ordre sur l’une des joueuses en forme du moment l’espagnole Suarez-Navarro, qu’elle pourrait retrouver d’ailleurs à l’aune des quarts de finale. En pleine confiance sur la terre parisienne, Maria Sharapova peut légitimement ambitionner réussir sa propre succession et réussir un doublé plus réalisé depuis 2007 et Justine Hénin.

    Serena a un compte à régler

    Serena Williams à la relanceUne performance que Serena Williams se ferait un malin plaisir de contrarier. A 33 ans, l’Américaine est sans conteste la principale rivale de la Russe dans sa quête terrienne. A son meilleur niveau, la n°1 mondiale est même intouchable comme elle l’a encore prouvé lors des deux dernières levées du Grand Chelem à New York puis Melbourne. A chaque fois, sur surface dur et rapide. Mais voilà, Roland-Garros se déroule sur terre, un revêtement où ses certitudes semblent s’égarer. Brillante en début de tournoi, la cadette des Williams s’était littéralement effondrée en demi-finale à Madrid contre Kvitova (6-2 6-3). Une claque attribuée à une blessure qu’elle promet résorbée. « Je me sens beaucoup mieux physiquement aujourd’hui. J’ai eu un petit peu plus de mal à me préparer que ce que je pensais, mais maintenant, je suis prête. J’ai pu et je me suis dit : c’est bon, ça va beaucoup mieux », tente-t-elle de rassurer.

    Un optimisme de rigueur pour l’Américaine qui reste sur une terrible déconvenue dans le tournoi parisien. En effet, arrivée tenante du titre l’an dernier, la n°1 mondiale avait été balayée par la puissance et la jeunesse de Garbine Muguruza. En deux petits sets, l’Espagnole d’origine vénézuélienne avait éjecté Serena dès le 2nd tour. Une défaite en forme de motivation au même titre que sa course vers les records. « Ecrire l’histoire est vraiment très motivant pour elle », lâche son entraîneur Patrick Mouratoglou qui connaît les ressorts de sa joueuse, dont le 3ème tour promet des retrouvailles endiablées avec Victoria Azarenka. Une idée que partage Martina Navratilova. « Je suis certaine qu’elle atteindra les 20 Grand Chelem. Depuis trois ans et sa défaite contre Virginie Razzano, elle a relancé sa carrière dans une nouvelle dynamique. Elle a réalisé que le temps passait et qu’elle voulait à tout pris marquer de son empreinte son sport. C’est impressionnant ce qu’elle fait à son âge (33 ans, ndlr). » Sur les traces de Steffi Graf et de ses 22 Majeurs, la femme aux 19 couronnes et 2 défaites cette saison (dont un forfait) est prête à reposer le pied sur terre et y apposer à nouveau son empreinte.

    Halep : « Je me sens bien sur terre battue »

    Kvitova veut briller à RolandDans l’ombre des deux reines du circuit, la foule des prétendantes fourbie ses armes. Placée dans la même moitié de tableau que l’Américaine (demi-finale potentielle), Petra Kvitova sait qu’elle peut tirer son épingle du jeu sur la terre française. « J’ai déjà joué les demi-finales en 2012 donc je sais que je suis capable de bien jouer là-bas. Je dois juste vraiment croire en mes chances. Je dois croire au moment où je soulève le trophée », explique la 4ème joueuse mondiale. Double lauréate de Wimbledon, la Tchèque arrive cette saison avec d’autres certitudes quant à son jeu sur ocre. Des certitudes acquises de l’autre côté des Pyrénées sur les courts de la Caja Magica de Madrid où elle a su mettre en place son jeu et laisser parler son formidable bras gauche.

    Si Kvitova se présente avec de sérieux arguments, il en va de même pour Simona Halep. A 23 ans, la Roumaine n’en finit plus d’épater par ses qualités sur le court. « Simona, elle a tout ce que donne le ciel : le talent, l’habileté, la vision », s’emporte son compatriote Ion Tiriac. Finaliste la saison passée, la protégée de Virginia Ruzici s’est, depuis, installée parmi les toutes meilleures joueuses du monde grâce à sa couverture de terrain et sa science des trajectoires. Des qualités sublimées par la terre battue. « J’aime chercher les angles. C’est aussi pour ça que j’aime la terre battue : on a le temps de réfléchir », glisse-t-elle dans L’Equipe Magazine.

    Halep est ambitieuseAu-delà de ça, la finaliste malheureuse de 2014 ne cache pas son plaisir de revenir sur la terre qui l’a « révélée ». « J'ai d'excellents souvenirs de mon parcours ici l'année dernière. J'ai joué de bons matchs cette année, j'ai acquis la certitude que je suis capable de jouer de longs matches et de passer trois heures sur le court sans perdre en concentration ou en lucidité. J'ai acquis de l'expérience, aussi (…) Je me sens bien sur terre battue en ce moment. C’est clairement une des surfaces où je me sens le plus en confiance et je sens que je m’améliore de jour en jour, à un tel point que je me sens prête pour un succès à Roland Garros cette année. » Une prétention normale d’autant que la n°3 mondiale a hérité d’un tirage clément tant Cornet, Radwanska, Makarova et Ivanovic ne présentent pas des obstacles insurmontables sur la route d’une demi-finale où l’attendra peut-être…Maria Sharapova.

    Derrière ces deux outsiders, il faudra regarder attentivement les parcours de la suissesse Timea Bascinszky placée avec notamment Kvitova, Madison Keys, révélation du dernier Open d’Australie, mais aussi Bencic ou Townsend. On n’oubliera pas non plus Andrea Petkovic, demi-finaliste surprise la saison dernière, dont le menu s’annonce copieux avec Errani, Jankovic et Wozniacki avant éventuellement Serena Williams en quarts.

    Des perspectives pour les Bleues ?

    Du côté des Bleues, la tâche s’annonce encore une fois ardue. Abonnée aux têtes de gondoles, Kristina Mladenovic a de nouveau été servie. Après Li Na, l’an passé, la Nordiste devra se coltiner la 6ème joueuse mondiale et demi-finaliste 2014 en la personne d’Eugénie Bouchard. La chance de la Française réside dans la dynamique catastrophique de la Canadienne qui n’a gagné qu’un match depuis la fin mars concédant 7 défaites. Une statistique effrayante mais dont il faut se méfier tant Bouchard a fait des Majeurs sa priorité. En effet depuis janvier 2014, cette dernière a toujours su briller à l’heure des Grands Chelem atteignant 1 quart de finale, 2 demi-finales et une finale (Wimbledon, ndlr). Malgré tout, la tricolore de 22 ans a un bon coup à jouer.

    Garcia mènera les FrançaisesDe son côté, Caroline Garcia aura plus de latitudes. Tête de série 31, la Française disposera de 2 tours pour se roder avant de rencontrer Ana Ivanovic, qu’elle a déjà dominée par deux fois cette saison à Monterrey et Indian Wells. Enfin, Alizé Cornet devra se méfier d’un premier tour piège contre Roberta Vinci. Une entrée en matière peu commode pour une Niçoise en pleine crise.  « Mon tennis ne s’est pas volatilisé ! Il y a deux semaines encore, je battais Halep (7-6 (6) 6-3 à Madrid). Il est quelque part, à moi de le trouver. Après, je suis inquiète, car je me dis: "Vais-je le trouver avec la tension qui va s’installer à Roland-Garros ?" Et, d’un autre côté, je me dis que c’est mon onzième Roland-Garros qui arrive, que j’ai l’habitude et que je vais réussir à gérer », s’interroge Cornet à qui Halep est promise en 8ème.

    Chacune à leur échelle, les meilleures actrices du circuit déborderont d’ambitions à l’idée de pouvoir soulever début juin la Coupe Suzanne-Lenglen. « L’ambition est le fumier de la gloire », écrivait en son temps le dramaturge italien Pietro Aretino.

    Christopher Buet


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  • Messi débloque la demie

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  • Barcelone exulte et entrevoie Berlin

    A la faveur d’un dernier quart d’heure enfiévré, marqué par trois buts, Barcelone a pris une sérieuse option sur la qualification pour la finale de la Ligue des Champions en dominant le Bayern Munich au terme d’une rencontre prodigieuse d’intensité.

    Messi débloque la demieToutes les histoires ont besoin d’un héros, celui qui guide les siens, leur ouvre le chemin quand il est trop escarpé, trop encombré, trop sombre. Dans la douce nuit catalane, la cité façonnée par les inspirations de Gaudi s’est trouvée son héros, ou plutôt l’a retrouvée. Transi d’amour, le peuple blaugrana s’égosillait. « Messi ! Messi ! Messi ! », chantait-il, comme on loue son Dieu dans une cathédrale. Si le fantasque architecte n’est plus, fauché par un bus une journée de juin 1926, le joueur argentin a, lui, rappelé qu’il est bien vivant, que son génie n’a rien perdu de son éclat après un quart de finale atone contre Paris et que ses fulgurances dessinent toujours les contours d’un artiste invraisemblable et incontournable répondant présent à l’heure de se dresser sur la grande scène continentale. « Leo Messi fait des choses que personne ne peut reproduire. Grâce à lui, nous avons toujours la garantie d'être un peu plus proches de la victoire. Je lui tire une nouvelle fois mon chapeau. Il nous rend heureux », encensait après la rencontre son capitaine Andres Iniesta. Car plus qu’un doublé, Lionel Messi a fait basculer, dans un dernier quart d’heure abominable pour les Bavarois, le sort de cette demi-finale fabuleuse d’intensité où les deux formations se sont livrés une bataille pleine de hargne et d’engagement pour obtenir la maîtrise du ballon.

    Le choc des blocs

    Neuer maintient les siens dans le matchDans un Camp Nou ayant revêtu ses habits de gala, le FC Barcelone et le Bayern Munich avaient décidé d’imposer leur jeu respectif, fait de possession et de longues séquences de préparation. Pour cela, l’un comme l’autre réclamait le contrôle du ballon. Dès lors, la pelouse catalane devint le théâtre d’un spectacle irrespirable où chacun exerçait une pression étourdissante à son opposant dès qu’il perdait l’initiative, allant jusqu’à chasser loin dans la moitié de terrain adverse. Une débauche d’énergie considérable même pour des équipes de ce calibre qui les contraignait à jouer sur un fil et où toute erreur pouvait se payer comptant. Ainsi après 12 minutes, Suarez se jouait de l’alignement bavarois et s’en allait défier seul Manuel Neuer. L’Uruguayen tentait de propulser le ballon de l’intérieur du pied dans le petit filet opposé mais sa frappe était repoussée par la cheville du portier allemand. Comme il l’avait annoncé la veille, ce dernier marquait d’entrée son territoire avec son autorité habituelle et permettait au Bayern de ne pas sombrer.

    L'impuissance du BayernTremblant sur sa base arrière, le Bayern Munich ne désarmait pas et parvenait à surprendre la défense catalane. Sur une bonne combinaison avec Thomas Müller, l’attaquant polonais faussait compagnie à ses « geôliers » d’un soir et se retrouvait seul aux 6 mètres. Là, il se jetait pour reprendre le centre de son coéquipier mais ne parvenait qu’à effleurer le ballon. Sans le savoir, l’homme au masque venait de laisser échapper la plus belle opportunité de son équipe. Car si le Bayern Munich soutenait la bataille du milieu de terrain et sembla même prendre un ascendant physique en début de seconde période, il était incapable de se montrer dangereux. Si Thiago Alcantara offrait un relais technique intéressant sur le flanc droit, l’Espagnol ne pouvait apporter cette accélération meurtrière dont Robben a le secret, permettant de déstabiliser le bloc défensif adverse. Sans son Néerlandais et Franck Ribéry, l’attaque bavaroise ronronnait sans ressources, frappant 8 fois au but sans cadrer le moindre tir. Du jamais vu pour le club bavarois depuis 2009 et une défaite contre Bordeaux.

    Messi déchaine les enfers

    « On n’a pas joué bas parce que si tu le fais, tu finis par perdre (…) Il fallait les éloigner de notre zone »,  expliquait Guardiola. Une tâche que ses hommes réussirent à accomplir pendant longtemps mais comme il l’avouait avec fatalité : « Ils sont tellement bons qu’ils finissent par trouver les espaces. » C’est bel et bien ce qui advint. Pris à la gorge par le positionnement et l’activité des bavarois, les Barcelonais peinaient à s’installer. « C'est un match très compliqué, une demi-finale de Ligue des Champions face à un très bon adversaire », constatait Lionel Messi qui avait vu Alves échouer comme Suarez sur Neuer peu avant la mi-temps.

    Messi déchaine un quart d'heure d'enferComme souvent, c’est du numéro 10 argentin qu’allait venir le salue catalan. Virevoltant et très concerné par la tâche défensive pour laquelle il multiplia les harcèlements, le natif de Rosario allait se mettre en évidence. On jouait la 77ème minute quand Neymar s’effondra dans la surface sur un centre de Messi. L’arbitre ne bronchait pas et laissait le soin à Neuer de relancer vite sur Bernat à droite. Remarquable d’anticipation, Alves sautait dans les pieds de son vis-à-vis, se jouait de lui d’un grand pont et servait sur sa gauche Messi. D’un contrôle, l’Argentin se replaçait à 20m et armait sa frappe. Une frappe aussi limpide que soudaine. Neuer eut beau se détendre, il n’y pouvait rien. Pour la première fois de sa carrière, le quadruple Ballon d’Or, plein de hargne, trompait le portier allemand et faisait exploser un Camp Nou suffocant.

    Messi assomme Neuer et le BayernComme désarçonner par ce but, le Bayern se désunissait très légèrement. Or le moindre relâchement ne pardonne pas à ce niveau d’exigence et d’excellence. Au cœur du jeu, Busquets éliminait le premier rideau bavarois et servait Rakitic. Le Croate ne se faisait pas prier pour adresser une ouverture lumineuse à Messi dans une défense distendue. La suite se passait de commentaire. Avec une simplicité désarmante, il se jouait de Boateng d’un crochet intérieur et exécutait Neuer d’un subtil piqué qui fila embrasser les filets. A l’image de son gardien, le Bayern était à terre, impuissant face à ce démon argentin. « Un joueur comme Messi est difficile à arrêter. Parfois on gagne, parfois on perd », philosophait le gardien bavarois. « Nous avons eu la chance de marquer face à une équipe qui tient beaucoup le ballon, qui a un style similaire au notre. Nous avons eu du mal à mettre le premier, et par chance nous avons pu en marquer deux autres. C'est un excellent résultat », savourait le héros du soir qui parachevait son œuvre dans le temps additionnel.

    Neymar et Messi se congratulentAlors que les Allemands avaient jeté leurs dernières forces dans une ultime offensive, Barcelone planta un contre. Dans le rond central, Messi alertait Neymar partit dans le dos de Benatia. Le Brésilien s’approcha et crucifia sans état d’âme un Neuer médusé avant de se jeter dans les bras de son passeur dans une étreinte folle et joyeuse (3-0). En l’espace de 15 minutes, Barcelone, dans le sillage de son prodige, avait fait exploser sa bête noire qui ne méritait pareille correction au vu des efforts déployés. « Ce soir, nous avons assisté à un grand spectacle entre deux équipes qui savent jouer au football », appréciait Neymar. Loin de fanfaronner, Messi prévenait : « Maintenant, il faut aller terminer le travail à Munich, sans excès de confiance, car le Bayern est très solide à domicile. » Comme pour rappeler que cette nuit endiablée n’était qu’un chapitre dont il avait été le héros et que l’histoire n’était pas terminée.

    Christopher Buet


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  • Camp-Nou champions

    Deux ans après avoir été massacré par le Bayern Munich à ce même stade de la compétition, le FC Barcelone accueille son rival bavarois pour cette demi-finale aller de la Ligue des Champions pour une opposition qui s’annonce flamboyante.

    Les travées du Camp Nou sont encore silencieuses, ses sièges bleu et grenat encore vides. L’immense cathédrale perdue dans la végétation de béton de la capitale catalane dort encore, de ce sommeil léger qui précède les grandes batailles, celles qui bâtissent les monuments et écrivent les légendes. En début de soirée, la quiétude des lieux aura disparu, remplacée par la fureur émanant des plus de 98 000 socios venus pour enflammer cette nuit qu’ils espèrent tous pouvoir un jour racontée, cette nuit où les leurs auront vaincus, cette nuit où ils auront accueilli comme il se doit leur « frère », chef d’orchestre de la grande symphonie catalane du tournant de la décennie (2009-2012).

    Le retour de GuardiolaLe retour de l’ancien « roi »

    Car oui, ce soir de début mai 2015, Barcelone voit revenir son enfant prodigue. Trois ans après avoir quitté « sa » maison, Pep Guardiola est de retour mais pas dans le même costume. Cette fois, c’est sur le banc adverse qu’il s’assoira. « C’est une sensation incroyable de revenir ici. J’ai tellement de souvenirs. C’est un grand moment pour moi. J’ai passé trente ans ici, mais je suis entraîneur du Bayern Munich maintenant », glisse l’entraîneur bavarois qui ne fait aucun doute de ses intentions. « Ce que je veux? Eliminer le Barça! On est venu travailler. »

    Un retour chargé en émotions que les Blaugranas sont prêts à encaisser. En effet, un ancien entraîneur et inspirateur ou pas, aucun traitement de faveur ne sera accordé. « L’affronter n’est pas une motivation. La seule motivation, c’est ce match. C’est une demi-finale de Ligue des Champions », lâche placide Lionel Messi qui avoue garder un bon souvenir d’un homme qui l’a aidé à grandir tant sur le terrain qu’en dehors mais avec qui il n’entretient plus le moindre lien. La page Guardiola semble donc bien tournée dans les têtes blaugranas. Un sentiment confirmé par Iniesta et surtout Luis Enrique. « C’est toujours sympa de revoir son ex-entraîneur... s’ils en ont le temps. Mais je suis sûr qu’ils mettent d’abord en avant l’importance de cette demi-finale. Il y a la fin du match pour se saluer... On ne veut pas battre Pep mais l’une des meilleures équipes du monde », assène-t-il.

    Le souvenir de 2013

    La démonstration de Müller et du BayernSi la réaction de Pep Guardiola sera scrutée lorsqu’il remontera sur l’impeccable pelouse barcelonaise, le monde du football aura surtout les yeux rivés sur le Camp Nou pour voir deux des meilleures équipes du continent se faire face dans un affrontement qu’il espère aussi mémorable que les précédents. Personne, surtout pas ici à Barcelone, n’a oublié l’humiliation de 2013 quand ce Bayern Munich, diabolique de maîtrise et d’efficacité, avait atomisé des blaugranas amoindris et désunis. Sept buts avaient alors récompensé la domination sans faille des Bavarois quand Barcelone n’avait même pas pu faire illusion. « Le 7-0 d’il y a deux ans ? Ce fut une grand expérience, nous avons joué de manière brillante, nous avons impressionné le monde du football », se souvient Thomas Mülle, auteur de trois réalisations cette année-là, et qui jouera à nouveau les poisons ce soir sur la pelouse. « Il y a deux ans, cette demi nous avait fait très mal, notamment au regard de nos performances ce soir-là (défaite 4-0 à l'aller puis 3-0 au Camp Nou), et de la façon dont nous sommes sortis de la compétition », se remémore, de son côté, un Lionel Messi plus amère.

    Depuis cette double confrontation, déjà en demi-finale, seule Valence, le 1 février 2014, est parvenue à inscrire 3 buts au Camp Nou (2-3). Surtout, le Bayern Munich a infligé au FC Barcelone sa seule défaite au cours des 32 derniers matches de Ligue des Champions à domicile. Il faut dire que le Bayern Munich est souvent synonyme de mauvais souvenirs pour les Catalans. En effet, en huit confrontations officielles, ces derniers ont perdu à 5 reprises, concédant deux nuls pour une maigre victoire. En 2009, Barcelone s’était imposé 4-0 au Camp Nou grâce à Thierry Henry, Samuel Eto’o et un doublé de Lionel Messi. « J’ai envie d’être à ce match pour ce qu’il signifie, ce que cela représente d’être en demi-finale de Ligue des Champions face à une grande équipe comme le Bayern Munich. Beaucoup de temps a passé depuis (2013). Notre équipe a changé, ce sera un match différent », assure l’Argentin qui aura à cœur de se distinguer après un très timide quart de finale contre le Paris Saint-Germain.

    Barcelone en pleine forme

    A défaut d’Eto’o et Henry pour l’épauler comme en 2009, le génie de Rosario a trouvé deux nouveaux compères sur le front offensifs avec Neymar et Luis Suarez. Un trio sud-américain dont les nationalités auraient pu laisser craindre le pire. « On a de très bonnes relations. Avec Neymar, on se connaissait déjà. Quant à Luis, il s’est très bien adapté au vestiaire et au groupe », explique Messi. Difficile de donner tord au quadruple Ballon d’Or tant l’entente parfaite et le talent de ce trio ont conquis observateurs et supporters. Plus que les 108 buts inscrits par les trois compères cette saison, le symbole réside dans le replacement sur le côté droit de Messi afin de rendre l’axe de l’attaque à Luis Suarez où l’Uruguayen pèse énormément sur les défenseurs par son placement, ses appels et son sens du but.

    messi-neymar-suarezDerrière ses trois solistes, Barcelone respire la sérénité. Conscients de pouvoir marquer à tout moment (Barcelone a inscrit 29 buts lors de ses 8 derniers matches), les blaugranas ont également resserré les lignes derrières. Autour de Javier Mascherano, Luis Enrique a restauré une certaine idée du pressing à la perte de balle. Plus compacts, les Barcelonais n’ont encaissé que 26 buts en 46 matches cette saison et sont même restés hermétiques au cours de leur 5 dernières rencontres.

    De son côté, le Bayern Munich n’affiche pas le même état de forme. Flamboyant il y a encore quelques semaines, le Champion d’Allemagne accumule les blessures. Outre Franck Ribéry jamais vraiment en forme cette saison, Arjen Robben a dû lui aussi faire un trait sur la demi-finale trahi par son mollet, comme Alaba touché au genou ou Badstuber à la cuisse. Autant d’éléments essentiels dans l’équipe bavaroise. Une situation dont les Allemands refusent de se servir comme une éventuelle excuse. « Nous savons que notre tâche s’annonce très compliquée mais je suis intimement convaincu que nous avons nos chances », balaye Manuel Neuer, qui retrouve Messi et Mascherano qu’il avait éteint en finale de la Coupe du Monde. « Je suis convaincu qu’on est capable de les mettre en danger », abonde Benatia. Une fois n’est pas coutume, le Bayern Munich se présente en léger retrait. Pas forcément la plus mauvaise posture pour surprendre un adversaire qui leur réussi si bien d’habitude et contre qui il n’a plus pris le moindre but depuis 197 minutes.

    L’heure avance et le Camp Nou attend de s’embraser dans cette douce soirée aux relents de légendes où les étoiles de la Ligue des Champions se sont données rendez-vous pour des retrouvailles enflammées.

    Christopher Buet


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