• Serena Williams ne veut plus lâcher son trophée
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    Au terme d’un combat absolument fabuleux, Serena Williams remporte l’US Open face à Victoria Azarenka (7-5 6-7 6-1 en 2h45). L’Américaine confirme qu’elle est la grande patronne du tennis féminin.

    victoria azarenka en larmes

    Les larmes. Alors qu’elle s’approche du filet pour saluer son adversaire, Victoria Azarenka ne peut contenir ses larmes. De retour sur sa chaise, la Biélorusse s’effondre, relâchement de toute cette pression qui s’était accumulée durant cette finale. La déception de la n°2 mondiale est à la hauteur de ses rêves, de ses espoirs et de la bataille qu’elle a livrée.

    Cette scène déchirante d’une joueuse prostrée sur sa chaise, accablée par la peine, contraste avec celle de la joie immense et communicative de Serena Williams. Au milieu d’un court Arthur Ashe transi, l’Américaine saute comme une puce, comme si elle venait de remporter son premier Grand Chelem. Pourtant, à 31 ans, la cadette des sœurs Williams vient de triompher pour la 17ème fois en Majeur, la cinquième à l’US Open. Mais que cette nouvelle couronne fut compliquée à coiffer.

    Serena Williams hurle

    Serena prend le vent

    Quelques heures avant ce dénouement heureux pour Serena Williams et un tennis américain en pleine sinistrose, une grande incertitude entourait cette finale féminine. Si la n°1 mondiale dominait allégrement son sujet depuis le début de la quinzaine avec seulement 16 jeux concédés et 2 breaks encaissés, son adversaire promettait une opposition d’une toute autre nature que celle rencontrée jusqu’ici. Il faut dire que Victoria Azarenka (n°2) était la dernière joueuse à avoir dominé Serena Williams, à Cincinnati, juste avant l’US Open.

    Aussi pour ce remake de l’édition 2012, c’est un vrai combat qui s’engagea entre les deux femmes dès l’entame de la rencontre. Sur un court ouvert aux quatre vents, un petit échange d’amabilités (2 breaks successifs) marquait les premiers émois de cette finale avant que ne s’engage les hostilités. Plus à l’aise que son adversaire, Victoria Azarenka tentait de faire le jeu et de mettre en difficulté son opposante. À 5-4 en sa faveur, la Biélorusse fut proche de parvenir à ses fins mais Serena Williams veillait au grain. Pestant contre cette brise infernale qui balayait le court, cette dernière parvenait enfin à régler son lancer de balle. Plus appliquée, la protégée de Patrick Mouratoglou se sortait du guêpier tendu par la tigresse à la chevelure d’or au terme d’un jeu long de plus de 9 minutes. Et comme souvent, ce jeu interminable profita à son vainqueur. Dans la foulée, l’Américaine enfonçait son adversaire et s’emparait de son service avant de conclure avec beaucoup d’autorité cette première manche de haute volée (7-5).

    Victoria Azarenka n'abdique pas

    Les ressources de Vika

    Sauf que Serena Williams n’est pas du genre à se contenter du gain d’un set, aussi abouti soit-il au regard de l’opposition proposée. Dans la lignée de ce qu’elle produisait depuis maintenant trois jeux, la n°1 mondiale poursuivit son entreprise de démolition. Plus précise, plus compacte dans son jeu, elle décramponnait une Azarenka bagarreuse mais dépassée par les évènements. Breakée d’entrée, la Biélorusse finissait par mettre fin à l’hémorragie de 5 jeux consécutifs concédés, en remportant sa mise en jeu (1-2). Un répit de courte durée puisqu’à 1-3 et alors qu’elle menait tranquillement sur son engagement, Azarenka commettait trois double fautes et offrait le jeu à une Serena Williams trop contente de la défaillance adverse. Double break, la messe était dite et déjà les coursives de Flushing Meadows préparaient la grande cérémonie pour leur « fille ».

    Mais voilà, cette finale ne pouvait se résumer à un cavalier seul. Avec cette hargne qui l’anime à chaque instant, Vika se rebella. Frappant avec toujours plus de conviction, la reine d’Australie refusait de rendre les armes et s’accrochait. Son abnégation payait puisque dans la foulée, elle effaçait l’un des deux breaks concédés. La bataille faisait rage. À corps perdu, Azarenka donnait tout et entraînait son adversaire dans des échanges ahurissants. L’intensité était clairement montée d’un cran et la lauréate du dernier Roland-Garros ne tenait que grâce à son service, bouée de sauvetage miraculeuse en cet avis de tempête venue de Minsk. Vint le 9ème jeu. Alors que Serena Williams servait pour le titre, le match allait entrer dans une autre dimension. Imperturbable jusqu’à présent, la tenante du titre vacilla au moment de porter le coup final. De son côté, Azarenka ne tremblait pas et finissait par refaire son retard dans une ambiance électrique. L’impensable venait de se produire. Malgré un double break de retard, Azarenka était revenue.

    La reine guerrière

    azarenka

    Pas pour longtemps toutefois. De retour, la n°2 mondiale était assommée dès le jeu suivant concédant une fois encore son engagement. Clap de fin ? Que nenni. L’élève de Sam Sumyk n’avait pas fait tout ça pour rien. N’écoutant que son courage, elle n’abaissait pas les armes et provoquait l’agacement de Serena Williams qui s’agaçait contre ce vent qu’elle avait pourtant dompté. Aussi irrationnel que cela puisse paraître, l’Américaine offrait le débreak sur une énorme faute directe. Le tie-break allait donc sceller le sort de ce second acte d’une qualité et d’une intensité prodigieuse.

    Devant un court Arthur Ashe tétanisé par la tension extrême du match, les deux joueuses se livraient une véritable guerre, assénant coups droits et revers avec une puissance et une précision diabolique. Dans ce déluge de gifles, c’est Vika et sa rage qui tiraient leur épingle du jeu. À 7-6 en sa faveur et sur service américain, la Biélorusse faisait exploser Williams dont le revers vint mourir hors des limites du court. Malmenée tout le set et après avoir manqué deux occasions à 6-4 et 6-5, Azarenka s’adjugeait la manche. Le regard animé par une immense détermination, elle relançait cette finale exceptionnelle.

    Serena-Williams saute de joie

    La saveur de la légende

    Cette bataille remportée, il fallait déjà repartir au front. Car Serena Williams est une ennemie qui ne tolère aucun relâchement. Et la reine guerrière de Minsk allait l’apprendre à ses dépends. Moins mobilisée que lors de l’acte précédent, elle se fit enfoncée dès les premiers échanges de la dernière manche. Sa sérénité revenue, Williams faisait exulter son public en réalisant le break. Une première prise suivie d’une seconde quelques minutes plus tard. Cette fois, Azarenka ne reviendrait pas. Impériale au service, à l’image de ce jeu à 3-1 où l’impact de ses balles résonna dans ce gigantesque théâtre, devenu le temps d’une soirée une infernale soufflerie, Serena Williams étouffait les derniers cris de révolte de sa dauphine à la WTA, après 2h45 d’une guerre totale et imitait Samantha Stosur, seule joueuse à avoir dominé Azarenka sur dur cette saison (31 victoires pour 2 défaites).

    Symbole de la tension extrême qui l’enserra, l’impératrice du circuit se mit au sauter dans tous les sens avant de crier à toute gorge déployée son soulagement et sa joie. Plus qu’une victoire, Serena décrochait un 17ème titre du Grand Chelem (autant que Roger Federer, ndlr) et entretenait sa légende. Celle d’une championne insatiable et indéboulonnable, statue africaine majestueuse trônant à la périphérie de New York, celle d’une étoile scintillante.

    Victoria Azarenka et Serena Williams
    Christopher Buet

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  • Richard Gasquet triomphe de Raonic et file en quart de finale

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    Après 15 échecs en 16 tentatives, Richard Gasquet s’invite à nouveau à la table des quarts de finale en Grand Chelem. A l’US Open, le n°1 français a terrassé l’immense canadien Milos Raonic (6-7 7-6 2-6 7-6 7-5 en 4h40).

    La joie est teintée de soulagement. Un soulagement viscéral et sincère, celui d’un joueur qui a enfin rompu ce lien maudit qui le liait, le condamnait à ce huitième de finale, refusant de le laisser s’aventurer par delà. Dans la moiteur de la nuit new-yorkaise et devant un public en transe, Richard Gasquet s’est débarrassé de cette encombrante liaison au bout de 4h40 d’un combat intense. En guerrier, le Biterrois est venu à bout de Milos Raonic et son monumental service. Plus qu’un cap, c’est une véritable montagne que Richard Gasquet a franchi à Flushing Meadows.

    Le court du destin

    Gasquet grimace

    A l’heure d’affronter Milos Raonic en huitième de finale de l’US Open, Richard Gasquet savait qu’il se trouvait face à une barrière : celle de sa capacité à franchir ce stade de la compétition. En effet, depuis que le tricolore joue sur le circuit professionnel il n’avait atteint les quarts de finale en Majeur qu’une fois en seize tentatives. Un blocage que beaucoup jugeaient insurmontable par le Biterrois. Pourtant à l’heure d’affronter Milos Raonic, ce dernier y croyait dur comme faire. Fallait-il dès lors y voir un symbole quand les deux hommes se présentaient sur ce court n°17, comme le 17ème huitième de finale de la carrière de Gasquet ? La première manche n’incitait pas à ce postulat. Si le n°1 français rentrait bien dans cette partie, il se heurtait rapidement au service de son adversaire qui après un petit réglage préalable, enchaînait les coups de boutoir. Gasquet avait beau se démener, la montagne de Podgorica (1,96m / 90 kg) était de nature inhospitalière.

    Après un échange de bons procédés (chacun offre son service à l’adversaire), c’est au tie-break que se décidait le sort de ce premier acte. Plus prompt, Raonic se mettait en évidence et se détachait d’emblée. Menant 5-1, le Canadien d’origine monténégrine finissait de concasser son adversaire avec ce redoutable enchaînement service-décalage coup droit long de ligne. Loin de démériter, Gasquet était contraint de plier. Passablement énervé par cette issue défavorable, ce dernier explosait et jetait de rage ses chaussettes sur le court. « J'étais trempé de sueur, je ne pouvais même plus courir tellement j'avais les chaussettes trempées : j'ai même changé les chaussures avant le tie-break... Je n'ai pas eu une réaction très classe (…) L'arbitre m'a dit ''ce ne sont pas les ramasseurs qui vont aller les chercher alors à toi de le faire'' », raconte le 9e mondial.

    Réactions et conséquences

    Ce geste d’énervement avait le mérite de prouver la détermination du Biterrois qui loin de se laisser abattre par la perte de 

    Milos Raonic

    cette manche, repartait à l’assaut. Si Raonic laissait parler son bras au service, Gasquet se battait pour donner le change à son opposant. La lutte acharnée entre les deux hommes se poursuivait jusqu’à déboucher sur un nouveau tie-break. Mais contrairement à celui du premier set, Gasquet l’entamait par le bon bout. Mieux, c’est lui qui finissait par faire la décision. Profitant de erreurs canadiennes, le tricolore s’engouffrait dans la brèche et chapardait la manche sur le même score qu’il avait concédé la précédente (7-4). Après un peu moins de 2h de jeu, les compteurs étaient remis à égalité (6-7 7-6).

    Mais cette débauche d’énergie allait coûter cher à l’ancien 7e mondial. Touché physiquement et incapable de renvoyer les obus de Raonic (38 aces au total), Gasquet fléchissait et abandonnait par deux fois son engagement sans parvenir à se saisir de celui du Canadien. Face à la baisse de régime tricolore, le 11ème mondial reprenait les commandes du match (6-2). L’affaire semble entendue, Gasquet n’est plus qu’une ombre sur le court n°17 qui baigne déjà dans l’obscurité la plus totale. La quatrième manche ne peut décemment échappé au finaliste du dernier Masters 1000 de Montréal. C’était sans compter sur la pugnacité de l’élève de Riccardo Piatti. Car Richard Gasquet a troqué les habits du « petit Mozart » pour les oripeaux de « Rambo ». Avec abnégation et talent, il refit surface et réengagea ce combat que Raonic croyait avoir remporté dès l’entame du 4ème acte quand il s’empara du service du Français.

    « C’a penché de mon côté »

    richard-gasquet

    Refusant d’abdiquer, Gasquet en remettait une couche et chahutait ce Canadien, remarquable rampe de lancement au service, mais au tennis encore trop limité pour tenir l’échange dès lors qu’il s’engage. Agressant son adversaire et variant le jeu avec intelligence, le n°1 français revenait dans la partie et s’offrait un nouveau jeu décisif, le troisième du match. C’est à ce moment là que le match prit une autre dimension. D’une bonne qualité, ce huitième de finale basculait dans la folie. Se rendant coup pour coup, Gasquet et Raonic se disputèrent ce tie-break avec une intensité remarquable. Premier à faire la différence, le premier s’offrait une première balle de set, puis une seconde, sans parvenir à les convertir. Sa chance était passée ? On put le croire lorsque le protégé d’Ivan Ljubicic se procura une balle de match à 7-8 mais d’une attaque croisée de revers Gasquet l’écartait. S’il ne réussissait à conclure la manche sur sa troisième balle de set, ce dernier s’exécutait sur la suivante, grâce à une énième faute en coup droit de son adversaire (70 fautes directes au total, ndlr). Ravi le public américain exultait, il y aurait un ultime acte à cette grande bataille.

    Surfant sur le gain du 4ème set, le tricolore attaquait de front le roc canadien qu’il dépossédait de sa mise en jeu. Un soulagement de courte durée puisque le Biterrois se montrait incapable de tenir son engagement dans la foulée.

    La rage de Richard Gasquet

    « J'ai vraiment pensé à Roland-Garros au 5e set car c'était un peu similaire, un gros combat très dur physiquement. Je me disais ''pas deux fois de suite'', ça serait quand même terrible. Cette fois ça a penché de mon côté. Je me suis vraiment battu jusqu'au bout », explique Gasquet en référence à cette rencontre face à Stanislas Wawrinka perdue après 4h18 de jeu et avoir mené 2 manches à rien. Poussé par l’ambiance électrique et les « Richard » suintant des tribunes, le Français trouvait les ressources pour s’emparer, à nouveau, du service adverse à 5-5. Sans trembler, il terminait le travail sur son engagement. Avec autorité et après 4h40 d’un combat harassant, Gasquet pouvait serrer les poings. Six ans, le Biterrois allait regoûter aux délices d’un quart de finale en Grand Chelem. « Je suis très heureux même si je suis aussi très fatigué. C'est une grande victoire, similaire à celle contre Roddick à Wimbledon en 2007 », apprécie celui qui avait alors rallié les demi-finales à Londres.

    Après quinze échecs, 11 de rang, Richard Gasquet a franchi la montagne. L’aventure ne s’arrête, toutefois, pas là. Si ce col a été effacé voilà qu’un nouveau, plus abrupt encore, se présente. Pour s’inviter au festin du dernier carré, il faudra en passer par l’interminable ascension du pic Ferrer. En chef de cordée avisé, Richard Gasquet sait ce qu’il l’attend. « Il fait très peu de fautes, il court partout, tape fort dans la balle. J'ai perdu en trois sets ici l'an dernier même si ça avait été un combat. Il faudra bien commencer et faire un gros match. Je vais essayer de gagner », note-t-il. De quoi se laisser gagner par l’ivresse des sommets ?

    Christopher Buet


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