• Le royaume attend son seigneur

    Roger Federer

    Dans la foulée de Roland-Garros, ces messieurs se retrouvent sur le vert gazon de Wimbledon pour la troisième levée du Grand Chelem. Si Nadal règne sur terre, le tapis vert londonien est plus indécis.

    Rien ne semble changer en ce lieu où le temps paraît suspendu, presque figé par une tradition vénérable et respectée. Point de couleurs flashy, point de cris hystériques, juste ce silence convenu dans un décor verdoyant où déambule sur les courts ciselés gentlemen et ladies tout de blanc vêtus. Wimbledon ne ressemble à aucun autre tournoi au monde. Berceau du tennis mondial, le All England Lawn Tennis and Croquet Club est un lieu éternel où règne une ambiance unique entre retenu, respect et noblesse.

    En cette fin juin, le calme qui sied à l’endroit va laisser place à la fureur d’une lutte sanguinaire entre les seigneurs du circuit masculin. Une guerre sans merci qui promet son lot de batailles épiques.

    Federer pour la décennie

    FedererN’en déplaise aux observateurs impatients, Roger Federer est loin d’avoir dit son dernier mot. Sevré de titre depuis le début de la saison, le Suisse a rétabli l’ordre en remportant pour la sixième fois de sa carrière le tournoi de Halle. Un 77ème succès qui renforce la confiance d’un joueur qui ne se sent jamais aussi bien qu’à Londres. « Je suis toujours très motivé pour Wimbledon et j'ai beaucoup réussi là-bas. Par conséquent, j'ai le sentiment que je peux toujours bien faire. J’ai confiance en moi. J'ai l'impression de savoir ce que je dois faire », explique-t-il.Federer 2003

    Il faut dire que le Bâlois a fait du gazon londonien son jardin. Un sanctuaire à la mesure de sa légende et de son jeu. Plus que tout autre, Sa Majesté connaît les subtilités de ce lieu emprunt d’histoire et de symboles. C’est ici, qu’il a connu ses premières grandes émotions tennistiques, tombant Pete Sampras en 2001 avant de venir y conquérir sa première couronne en majeur et de s’emparer du trône mondial. C’était en 2003 face à Mark Philippoussis, il y a une éternité. Dix ans après son premier sacrement, le recordman de victoires en Grand Chelem (17) entend fêter comme il se doit ce dixième anniversaire et rééditer sa performance de l’an passé. En juillet 2012, Roger Federer avait brisé les rêves d’Andy Murray et les cœurs d’un Centre Court acquis à la cause de l’enfant du pays.

    Murray, le prince voulant être roi

    Andy murrayMurrayMais la tâche du septuple lauréat de Wimbledon s’annonce des plus ardues. Le premier assaillant n’est nulle autre qu’Andy Murray. Finaliste malheureux en 2012, le Britannique ne veut plus revivre l’émotion déchirante d’une défaite en finale. Dans le Royaume, personne n’a oublié les larmes lacérant, le visage meurtri de l’Ecossais qui perdait pour l’occasion sa cinquième finale de Grand Chelem.

    Depuis cet épisode tragique mais fondateur, Andy Murray a su trouver les ressources pour vaincre ce qui semblait être une malédiction. Moins d’un mois après, il prenait sa revanche en finale des Jeux Olympiques, terrassant un Federer éreinté. L’or autour du coup, il glanait son premier Majeur du côté de Flushing Meadows, dominant un Novak Djokovic impuissant. Plus complet, plus serein et délester du poids de la succession de Fred Perry, le Prince écossais s’est parfaitement préparé pour se coiffer de la couronne londonienne. Blesser au dos et forfait pour Roland-Garros, il a peaufiné son jeu sur gazon et valider ses acquis en décrochant le titre au Queens. « Je pense que ce pourrait être l'année de Murray » veut croire John McEnroe. Hasard du tirage au sort, il est tombé dans la même moitié de tableau que son bourreau de 2012.

    Nadal pour l’histoire

    Rafael NadalAbsent en début de saison en raison de ses ennuis au genou, Rafael Nadal est intraitable depuis son retour à la compétition. En neuf tournois, il a remporté 7 titres et disputé 2 finales, écrasant au passage Roland-Garros pour soulever sa huitième coupe des Mousquetaires, fait inédit en Grand Chelem. Un bilan insensé mais qui s’explique par la nature d’une surface qu’affectionne le Majorquin. Sur ses neuf tournois joués, huit se tenait sur terre battue. La saison terrienne clôturée, son oncle et entraîneur Toni s’inquiète. « C’est sur cette surface que le risque est plus grand », confie-t-il évoquant les contraintes soumises au genou de son neveu.

    Une précaution que Roger Federer ne prend pas. « C'est dommage. Ce serait bien de voir les joueurs en dehors de leur zone de confort un peu plus souvent. Maintenant, on peut jouer le même jeu sur terre battue, sur herbe et sur dur. Au départ, ce n'était pas l'idée en ayant plusieurs surfaces », regrette le Suisse. Si d’aventure, il l’emportait, Nadal rejoindrait Borg dans l’histoire comme le deuxième joueur à réussir un troisième doublé Roland-Garros-Wimbledon, après 2008 et 2010. Pour ce faire, Nadal n’aura pas un tableau évident puisqu’il pourrait trouver sur sa route Roger Federer…dès les quarts de finale puis Murray ou Tsonga avant une hypothétique finale contre Djokovic, à moins que le fantôme de Lukas Rosol ne vienne tourmenter le Majorquin de nouveau (ndlr : l’an dernier, le tchèque avait éliminé Nadal dès le second tour)

    Djokovic en douceur

    Paradoxalement, Novak Djokovic est celui qui a le moins de chance, parmi le Big Four, de triompher à Londres maisDjokovic également le plus. Cela tient à deux données. D’un côté, Djokovic présente une forme incertaine sur gazon. Défait au terme d’un match fantastique d’intensité en demi-finale de Roland-Garros, le Serbe n’a pas disputé la moindre partie sur gazon avant Wimbledon. Or, le Serbe est loin d’être un métronome sur cette surface au rebond bas et fusant, sa victoire en 2011 est un trompe l’œil tant il dominait le circuit à cette époque et surfait sur une confiance inébranlable.

    Si le Serbe n’a pas la main verte, sa chance réside dans le tirage au sort du tournoi. Placé dans la partie haute du tableau, il évite Federer, Murray et Nadal tous en bas de tableau avec Tsonga. De fait, l’aigle belgradois va pouvoir se rôder tranquillement jusqu’à un éventuel quart de finale contre Gasquet ou Berdych. Son envol se fera donc en douceur.

    Gasquet peut y croire, Tsonga gâté

    GasquetDu côté des tricolores, Richard Gasquet s’en tire le mieux. A Wimbledon, le Biterrois a le chemin dégagé jusqu’au huitième de finale. A ce stade, qu’il n’a plus franchi depuis sa demi-finale ici-même en 2007, il devrait retrouver Tomas Berdych. Le Tchèque mécanique va avoir à cœur de s’illustrer après un Roland-Garros complètement manqué (ndlr : éliminé au premier tour par Gaël Monfils).

    Dans le bas du tableau, Jo-Wilfried Tsonga va avoir fort à faire avec un premier tour contre le prometteur mais encore tendre belge David Goffin. Derrière, il pourrait retrouver le fantasque Ernests Gulbis, Benneteau puis Cilic (n°12) avant de défier en quart Andy Murray sur ses terres puis le vainqueur du probable Federer-Nadal. Autant dire que cette quinzaine sur herbe ne s’annonce pas de tout repos pour le Manceau qui se fait (pourtant) une joie de renouer avec cette surface et ce tournoi où il reste sur deux demi-finales.

    Pas de chances également pour Benoît Paire qui dès le troisième tour sera aux prises avec Rafael Nadal. Un sort partagé par Jérémy Chardy qui lui devra affronter Novak Djokovic à ce stade de la compétition, et Nicolas Mahut. Vainqueur de son premier tournoi la semaine dernière, le trentenaire (31 ans) pourrait se frotter à Murray s’il parvient au troisième tour.

    Dans l’ambiance feutrée de Wimbledon, la guerre s’annonce féroce entre les différentes forces en présence. Le trône londonien se mérite.

    Christopher Buet


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