• Bussy s'invite à Paris

    marathon-de-Paris_galleryphoto_paysage_std
    Avec plus de 40 000 participants en cette année 2012, le marathon de Paris a une fois de plus prouvé qu’il était plus qu’un simple rassemblement sportif mais bien une fête populaire et familiale. Un instant de communion, symbole d’une ville pour qui le sport est plus qu’un loisir, un art de vivre. Là, Alexandre et Florian couraient leur premier marathon. Une expérience unique.
     
    La ville est encore endormie comme une plaine bercée par un doux hiver, le soleil n’a pas encore entamé sa folle course dans le ciel nous gratifiant de sa lumière et pourtant, une certaine agitation règne. Il est 6h45 à Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne) et la gare grouille déjà en ce dimanche d’avril. C’est un véritable défilé de chaussures de sport, de joggings et de coureurs qui s’orchestrent en cet endroit exigu et souterrain. Parmi eux, on retrouve Alexandre et Florian, deux amis du club d’athlétisme de la ville buxangeorgienne, qui ont décidé de participer à leur premier marathon. Car oui, la raison de toute cette agitation, en plein week-end période dédiée à la grasse matinée, n’est autre que le Marathon de Paris, évènement annuel célébrant la course à pied. « C’est la course ultime pour tout coureur, tout athlète. On se devait d’y participer. » confie Florian, jovial mais tendu. Mythique, l’épreuve l’est assurément. Terrifiante aussi.
     
    La transhumance athlétique
     
    Toutefois l’heure n’est pas à la tergiversation, il faut rejoindre la capitale et les Champs-Elysées où sera donné le grand départ. Une heure sera nécessaire pour rallier le dit lieu. Une heure au cours de laquelle, les deux hommes en profiteront pour se remémorer le chemin parcouru depuis qu’ils ont pris cette décision de participer à cette course. « J’étais chez moi quand Alexandre m’a proposé de faire le marathon. Un peu réticent au début, je me suis dis qu’entre septembre et avril, on avait le temps d’y arriver. » raconte un Florian expansif. Alexandre, plus réservé, acquiesce sans dire mot. On sent une vraie complicité entre eux qui les amène à se soutenir l’un et l’autre quand ils confient leurs états d’âme peu durant le trajet. Leur dernier instant de calme et d’intimité. Car une fois débarqués à Paris, c’est une véritable marée humaine qui nous alpague. Chaque station apporte son lot de coureurs, aisément identifiables avec leurs tenues bariolées, flashy et leur « juste au corps ». Ceci n’est qu’un avant-goût du raz de marée qui attend une fois sorti de l’étau que constitue le métro. Au dehors, c’est une vague qui se dessine et dicte le mouvement. Le soleil a fait son apparition et inonde l’avenue Foch, théâtre de la future arrivée mais encore immense vestiaire à ciel ouvert. Ça et là, on se change, on dépose ses affaires, on discute, on s’échauffe. On se réchauffe aussi en raison de ce vent froid et insidieux. Une donnée supplémentaire dans l’équation de ce premier marathon déjà fort intimidant. Peu à peu, les visages détendus de Florian et Alexandre laissent poindre un stress de plus en plus crispant. « Je suis stressé, très stressé…» disent-ils en cœur tout en se frayant un chemin parmi la foule.
     
    Un départ long à se dessiner
     
    Il est 8h20 et il est temps de rejoindre l’aire de départ. Le cadre est idyllique semblable à une carte postale. 

    marathon

    Remonter l’avenue Foch au bout de laquelle se dresse fièrement l’Arc de Triomphe pour ensuite traverser à pied (!) une place de l’Etoile exceptionnellement vide et se présenter en haut des Champs-Elysées sur la plus belle avenue du monde. Passé le décor, c’est un flot ininterrompu qui se dirige vers la ligne de départ. Un flot néanmoins organisé. En effet, chaque coureur appartient 
    à un groupe programmé pour réaliser sa course en un temps précis. Pour les deux buxangeorgiens, c’est sous l’étendard vert annonçant les 4h que la procession continue. Là commence une interminable attente. Les gens se bousculent, cherchent à se placer, guettent le moindre signe de mouvement. Car si le départ officiel est prévu à 8h45, celui-ci ne concerne que la catégorie élite (les professionnels). Ensuite chaque groupe se présente et est invité à s’élancer. Aussi pour rendre plus agréable l’attente, le speaker s’égosille pendant que la sono enchaine les titres des Rolling Stones et autres groupes de rock. Insuffisant pour déconcentrer Florian qui profite de ce répit pour s’enduire les jambes de crème. « C’est pour éviter que ça frotte durant la course. » se justifie-t-il. Là au milieu de cette masse impressionnante, le stress se fait encore plus palpable. « 4h putain, 4h... » souffle encore Florian qui ne se départie jamais de son sourire. L’heure est enfin venue. Appelés sur la droite de la prestigieuse avenue, ils s’élancent enfin dans une même foulée légère et assurée. Le plus dur est devant eux.
     
    Cruel marathon
     
    C’est peu dire que cette épreuve est un défi qui vous impose une souffrance insoupçonnée et vous amène à vous surpasser en allant chercher vos ressources au plus profond de votre être. Un marathon peut s’apparenter à un voyage intérieur. Entre amis, en famille, en couple, c’est bien seul qu’il faut faire face à la douleur et à ce corps qui vous enchaine. La course va parfaitement se dérouler pour les deux amis qui, de concert, traversent le bois de Vincennes pour entamer leur retour vers les quais parisiens. Cependant, cette belle balade allait se gâter pour Alexandre. Moins en jambes, le cadet (20 ans) voit Florian s’échapper. Il tentera bien de tenir l’allure mais en vain. Cet effort violent pour essayer d’accrocher la foulée de son compère va lui couter beaucoup d’énergie. Aussi au km 25 près de l’île de la Cité, il compte déjà une bonne quinzaine de minutes de retard. L’écart ne fera dès lors plus qu’augmenter. Irrémédiablement. D’autant qu’Alexandre va jouer de malchance. 5 kilomètres plus loin, non loin des célèbres et charnières 35ème, le jeune homme se coince le genou. Ne pouvant plus s’appuyer correctement sur sa jambe droite, il va multiplier les arrêts et perdre un temps considérable. Si la douleur se fait intense, il n’envisage pas l’abandon comme un exutoire. Surpassant sa gêne, il s’accroche et se bat pour atteindre son objectif et finir son premier marathon.
     
    Première réussie
     
    Les kilomètres défilent et l’accablent un peu plus sans entamer sa détermination. Plus avant, la ligne d’arrivée est un théâtre balayé par les vents où s’amoncellent les coureurs dans un bruit retentissant. Les secondes et les minutes s’égrènent au rythme de joies intenses et sincères teintées de soulagement et de fierté. Cette dernière ligne respire ce doux parfum d’accomplissement. Arrive le cap des 4h mais point de traces de Florian ou d’Alexandre. Ce n’est qu’une demi-heure plus tard, sur le coup de 4h33, que le premier nommé fait admirer sa foulée pour terminer dans les 25 000 premiers arrivants. Le calvaire d’Alexandre, lui, continue et c’est le visage marqué par la douleur et l’effort, la foulée saccadée et le souffle court qu’il se présente à l’embouchure de la dernière ligne droite. Une dernière accélération et le voilà qui conclue sa course au-delà des 5h12 à une honorable 30 025ème place. Plus que le résultat, loin de l’objectif initial, l’essentiel est ailleurs. Pour leur première participation, les deux athlètes sont parvenus à boucler leur Marathon. Perclus de crampes et de douleurs après cet effort violent, ils rentrent avec ce sentiment partagé entre l’abattement de ne pas avoir pu tenir leurs objectifs et la fierté d’avoir réussi leur pari.
     
    Dans une ambiance de fête et de partage, Alexandre et Florian seront allés au bout d’eux-mêmes sans jamais faillir et auront donné rendez-vous pour une nouvelle édition. Pour la petite histoire, c’est le Kényan Biwott qui a remporté la course en 2h05’03’’ (record de l’épreuve). Mais là n’est pas le principal. Loin de ses sommets, c’est dans cette foule, cœur vibrant de l’évènement, que réside l’essence même du Marathon. Plus qu’une course, une institution et une fête du sport et un art de la vie.
     
    Christopher Buet

    Tags Tags : , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :