• Novak Djokovic s'impose à Shanghai

    Déjà vainqueur la semaine passée à Pékin, Novak Djokovic s’est de nouveau imposé à Shanghai au terme d’une finale plus que disputée face à Juan Martin Del Potro. Voilà maintenant trois ans que le Serbe est invaincu en Chine.

    Djokovic en transeSon cri rauque et puissant vint déchirer la nuit de Shanghai et étourdir le nombreux public venu se masser dans les travées de ce stade monumental, lotus d’acier et de béton aux airs de théâtre à ciel ouvert. En son cœur, Novak Djokovic libérait sa joie et son soulagement au sortir d’un nouveau combat dantesque. Cette fois, point de Rafael Nadal pour donner la réplique de l’autre côté du filet comme la semaine passée à Pékin mais Juan Martin Del Potro. Un colosse venu d’Argentine armé de son coup droit et de sa puissance qui assomèrent Nadal au tour précédent. Un colosse qui le poussa à guerroyer près de 2h30 dans la moiteur locale. « Jusqu'au dernier point je ne savais pas si j'allais être capable de m'imposer. C'était vraiment un match très équilibré, très serré », avoua le n°2 mondial.

    Pourtant rien ne laissait présager pareille difficulté à l’issue d’un premier set à sens unique. Implacable en demi-finale face à Nadal – « J'ai rarement affronté des joueurs qui ont affiché le même niveau de jeu que lui aujourd'hui », confessait l’Espagnol à propos de son bourreau argentin –Juan Martin Del Potro ne parvenait pas à mettre son jeu en place. Trop timide, trop timoré, trop approximatif, il laissait l’initiative à son opposant qui n’en demandait pas tant. Brillant de concentration et de précision, le natif de Belgrade ne se laissait pas prier et étouffait son adversaire sans lui laisser la moindre chance de se défaire de son étreinte. Métronomique, il s’installa sur sa ligne de fond et distribua le jeu à sa guise avant de porter l’estocade quand il le jugeait opportun.

    Balloté en quart de finale par la puissance de Monfils, Djokovic faisait le nécessaire pour se rendre cette finale la plus simple possible. Sans frémir, il s’adjugeait la première manche (6-1), n’abandonnant qu’un maigre jeu à l’Argentin, un jeu que ce dernier dû arracher après avoir écarté 2 balles de set à 0-5.

    Retour désarticulantDel Potro se rebelle

    Mais Juan Martin Del Potro n’avait pas franchi tous ces obstacles pour se faire laminer sans réagir. Car la Tour de Tandil n’est plus cet édifice fragile qu’un poignet handicapait. Aussi, le lauréat du tournoi de Tokyo dimanche dernier oubliait les évènements du premier acte pour enfin entrer dans son match. Le réveil était brutal et Djokovic fut surpris quand l’Argentin haussa le ton. S’appuyant sur un service retrouvé (3 aces contre 0 au Serbe dans ce second set), le 5ème joueur mondial faisait reculer son adversaire et obtenait le temps nécessaire pour ajuster son terrible coup droit.

    Bousculé par la soudaine révolte adverse, Djokovic dégoupillait. A 0-1, ce dernier se mit à bouger de façon extrêmement bizarre. Comme un pantin désarticulé, il trébucha sur 3 coups droits consécutifs, commettant 3 fautes directes. Stupeur dans l’assistance qui n’avait jamais vu le finaliste du dernier US Open se mouvoir de la sorte. Aubaine pour Del Potro qui se saisit de l’opportunité pour s’emparer de la mise en jeu adverse. Sonné, le Serbe ne parvenait plus à se montrer dangereux et devait se résoudre à plier devant la puissance retrouvée du vainqueur de l’US Open 2009 (6-3).

    « Une terrible défaite »

    Del Potro dépitéDel Potro revenait de loin mais n’était pas au bout de ses peines car son ascendant ne dura pas. Il faut dire que ces deux dernières années, des Jeux Olympiques à Wimbledon, les deux hommes avaient habituéà des affrontements aussi spectaculaires qu’indécis orcette finale ne pouvait déroger à cette règle. Si les deux premiers furent à sens unique, le troisième acte fut âpre et disputé. Pour la première fois, les deux hommes élevaient leur niveau de jeu de concert pour délivrer un spectacle digne de l’évènement.

    Ne dérogeant pas à sa ligne de conduite, Djokovic mettait la pression à son adversaire en variant inlassablement. De son côté, Del Potro répliquait en assénant d’immenses gifles de coups droits, balles traversant le courts comme des météores le ciel étoilé.  L’intensité montait à mesure que le dénouement approchait, à l’image d’un Argentin qui avait remisé sa nonchalance coutumière pour le costume du guerrier éructant après chacun de ses coups gagnants (34 au total). Impériaux au service, les deux hommes allaient devoir en découdre au tie-break et à ce petit jeu, c’est le quadruple vainqueur de l’Open d’Australie qui s’en sortit le mieux.  « Le match était très serré et je pense que Nole a joué des points incroyables dans le tie-break », reconnaissait fair-play l’Argentin qui ne pouvait cacher une pointe d’amertume dans ce nouvel échec. « C'est une terrible défaite pour moi. J'étais tout près de le battre après avoir battu Nadal. » « Chacun de nous deux aurait pu gagner. J’ai juste essayé de contenir mes Djokovic fait rompre son adversaireémotions et de croire suffisamment à la victoire à la fin pour jouer les bons coups aux bons moments », avançait pour sa part Djokovic qui finissait par briser Del Potro. Une faute dans le couloir à 3-5  offrait 3 balles de match au Serbe. Ce dernier ne faillissait pas et concluait l’affaire long de ligne sur une nouvelle merveille en revers. A l’autre bout du terrain, l’Argentin avait abdiqué.

    Plus que la conservation de son titre, Novak Djokovic prolonge son invincibilité en Chine où il n’a plus perdu depuis 3 ans et reste sur une série de 20 victoires. Son cri peut bien résonner, l’Aigle de Belgrade règne sur l’Empire du Milieu.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Roger Federer

    Alors que le mois d’octobre ne s’égrène que depuis quelques jours, joueurs et joueuses de la planète tennis se projette déjà vers 2014, à l’image de Roger Federer et Maria Sharapova.

    L’année 2013 n’est pas encore terminée que déjà un doux parfum de 2014 semble flotter au-dessus des circuits ATP et WTA. En ce doux mois d’octobre, les jambes sont lourdes et les esprits lessivés par une saison une fois de plus harassante. Ce n’est donc pas surprenant de desceller les premières failles et surtout d’observer une certaine lassitude parmi les acteurs de la grande parade tennistique.

    Ne prendre aucun risque

    Maria Sharapova reviendra en 2014Figure de proue de tennis féminin, Maria Sharapova a choisi de mettre un terme prématuré à un exercice qu’elle n’avait certainement pas imaginé ainsi. De retour sur le podium mondial en compagnie de Serena Williams et Victoria Azarenka, la Russe entendait poursuivre sa marche glorieuse reprise au mois de juin 2012 et cette victoire sur la terre ocre de Roland-Garros, dernier bastillon du Grand Chelem qui résistait à ses gifles de coups droits et ses cris assourdissants. Mais voilà, la grande sibérienne ne dispose pas d’un physique nécessaire pour soutenir la guerre que lui impose le duo américano-biélorusse. Refusant d’abdiquer par fierté et en vertu de son caractère de championne, Sharapova va s’épuiser.

    Si les premiers mois sont à son avantage avec deux demi-finales de Majeur notamment, c’est au cœur de l’été que la belle mécanique blonde se grippe. Sur le beau gazon de Wimbledon, ses appuis se dérobent dès le second tour face à la portugaise De Brito. Plus qu’une simple chute, à 26 ans, Sharapova doute et se cherche. Aussi, elle se sépare dans la foulée de sa déroute britannique de celui qui l’avait ramené sur le devant de la scène Thomas Hogstedt et choisi de confier son jeu balbutiant à Jimmy Connors. L’association vole en éclat moins de deux semaines après son officialisation, signe du mal-être qui ronge la lauréate de Wimbledon en 2007. Un mal qui affecte son corps.

    Car si la tête flanche, le physique flanche. Près de 2 ans après son retour aux affaires, c’est son épaule déjà meurtrie qui grince. « Je suis très déçue de ne pouvoir jouer le Masters cette année. Ça va sincèrement me manquer de ne pas voir les fans là-bas, ils amènent tellement d'énergie », explique celle qui n’a plus disputé le moindre match depuis mi-août et une défaite au premier tour de Cincinnati. Une décision raisonnable dictée par son désir de contester encore à l’avenir ces principales adversaires. Dans cette optique, Sharapova a donc choisi le repos pour préparer au mieux 2014. Dans cette optique, elle a également procédé à quelques ajustements et recruté le préparateur physique de l’équipe de France de Fed Cup.

    « 2014 sera une grande année »Federer à Shanghai

    Si Sharapova a renoncé à se battre pour les dernières semaines de l’année, ce n’est pas le cas de Roger Federer. Comme la Russe, le Suisse a vécu une année particulièrement compliquée. Inconstant, moins précis, moins vif, moins aérien que par le passé, l’ancien numéro 1 mondial a peiné. Demi-finaliste à Melbourne en janvier, il a décliné par la suite. Lesté de 7 semaines d’inactivité entre mars et mai, le Bâlois n’a jamais pu se défaire de son boulet. Honnête quart de finaliste à Roland-Garros, le recordman de victoires en Majeur allait subir l’affront suprême début juillet. En son jardin de Wimbledon, il était raccompagné vers la sortie par l’impertinent serveur-volleyeur ukrainien Stakovskiy dès le second tour. Un crime pour le septuple maître des lieux qui n’avait plus connu la défaite avant un quart de finale en Grand Chelem depuis 2003. Un accroc suivi d’un second à Flushing Meadows où il est balayé par Robredo en trois manches. « J'ai toujours su qu'après une année 2012 très riche et très dure, avec les Jeux Olympiques en plus, cette saison serait un peu plus calme. Je m'attendais à connaitre moins de succès », se convint-il.

    Un détachement qui cache en réalité un sentiment d’échec profond pour un homme qui ne jure que par l’écriture de sa légende. Conscient d’avoir manqué sa saison, Federer se refuse à la laisser filer. « L'objectif, ça a toujours été de se qualifier pour le Masters. C'est le top du top et je veux absolument en être. C'est une motivation pour moi de jouer ce tournoi », martèle le désormais 7ème mondial. Le Maestro de 32 ans le sait bien, c’est par la compétition en répétant ses gammes, en conservant le rythme qu’il préparera au mieux son retour au premier plan. « Je sens que mon meilleur tennis est en train de revenir et c'est le plus important », assure Federer. Empli de détermination et visiblement remis de ses maux qui bloquaient Rafael Nadal lance le combatson dos cet été, l’artiste Bâlois se lance dans une grande tournée qui le mènera de Shanghai à Paris et il l’espère à Londres. Mais Federer veut voir plus loin que cette fin de saison infernale. « 2014 sera une grande année, je suis déjà focalisé », avance le Bâlois, qui a du plier devant la régularité de Monfils en terre chinoise (4-6 7-6 3-6).

    Avantage Nadal ? Pas si sûr

    Alors que Sharapova et Murray ont dit stop, que Federer fourbi ses armes, les autres cadors préparent à leur manière le futur. Si Serena Williams apparaît indestructible d’autant qu’Azarenka connaît une baisse physique, chez les hommes, Rafael Nadal et Novak Djokovic intensifie leur duel. Encore en finale l’un contre l’autre à Pékin, les deux hommes ont fait un échange de bon procédé, le titre au Serbe et le trône à l’Espagnol. Une passation de pouvoir comme pour asseoir l’ascendant pris par le Majorquin. Pourtant, le succès du protégé de Marian Vajda laisse augurer que la donne n’est plus aussi simple qu’au soir de la défaite new-yorkaise. En finale de l’US Open, le Taureau de Manacor avait asséné une charge terrible à son adversaire et envoyé l’Aigle de Belgrade au sol, brisé par la puissance et la maîtrise ibérique.

    Un constat troublé par le succès pékinois d’un Serbe, jamais aussi dangereux que toucher dans son orgueil. « J'avais besoin de cette victoire aujourd'hui. Je voulais vraiment soulever ce trophée et gagner contre Nadal, qui a été le meilleur joueur de la saison 2013 jusqu'ici. C'est très important pour ma confiance et pour mon mental », apprécie Djokovic qui, le goût du sang dans la bouche, sait la valeur de cette victoire. « Je n'ai pas vu de moyen pour le stopper cet après-midi, jeDjokovic triomphe à Pékin n'avais pas de solutions. Il a été trop fort pour moi », reconnaît Nadal, dominé pour la première fois sur dur depuis mars 2012.

    Depuis 2011, les deux champions se livrent un véritable combat où chaque coup porté à son adversaire est suivi d’une réplique plus forte encore. Alors que Nadal avait semble-t-il trouvé la solution face à son tourmenteur venu de l’Est de l’Europe, Djokovic a étouffé son oppresseur pour entrouvrir une nouvelle porte de solutions. Si 2014 se prépare en coulisses, elle se prépare également sur le court où les rivalités s’exacerbent et les confiances se forgent. Mais avant de se plonger dans l’année suivante, reste encore une dernière ligne pour clôturer en beauté une saison passionnante.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Djokovic-met-fin-au-regne-de-Nadal

    A l’aube de la saison de terre battue, le tennis masculin a assisté au crépuscule d’une ère. Invaincu depuis 2003 à Monte Carlo, Rafael Nadal s’est écroulé en finale face à la supériorité de Novak Djokovic (6-2 7-6). Impérial, le Serbe lance ainsi parfaitement sa quête le menant vers Roland Garros.

    Nadal défait à Monte Carlo

    Et ce coup droit partit, telle une étoile filante déchirant le ciel azuré d’une douce après-midi de printemps. A quelques mètres, immobile, Rafael Nadal suivait d’un regard résigné cette balle. Il avait compris que cette fois, c’était la bonne, que cette fois, il ne s’en sortirait pas et qu’il venait d’être vaincu. S’en suivit une monumentale détonation, un cri rauque à la puissance charnelle s’échappant du plus profond de Novak Djokovic. Les bras levés et dessinant une croix, le Serbe comprenait, également, qu’il venait de terrasser le plus inaccessible et insatiable des monstres et de conquérir le plus assujetti des courts du monde, celui que l’ogre de l’ocre avait fait sien. En effet, en un peu moins de deux heures et deux sets (6-2 7-6), le n°1 mondial venait de s’emparer de Monte Carlo, l’antre de la bête, cette terre de prédilection qui était devenu pour le Majorquin un temple sacré, presque un sanctuaire inviolable et inviolé (ndlr : le cinquième joueur mondial restait sur 46 victoires consécutives sur le Rocher). Et c’est peu dire que le natif de Belgrade a mérité son triomphe.

    Alors qu’on le disait claudiquant, en délicatesse avec cette cheville grinçante, Novak Djokovic allait apporter un démenti extraordinaire. La vielle, déjà, quand il s’agit d’écarter Fabio Fognini, tombeur en quart de finale de Richard Gasquet (6-2 6-1), le Serbe avait preuve d’autorité et forcé le respect de son adversaire. « Il vient de me battre en 52 minutes et on me demande s’il était blessé ! » ironisait exaspéré l’Italien. En ce dimanche, le dernier vainqueur de l’Open d’Australie n’a semblé ressentir aucune gêne. Imperturbable, malgré un éphémère passage pluvieux ayant retardé le début de la rencontre, Djokovic percutait d’entrée et prenait à la gorge un Nadal pas encore réveillé. Profitant des circonstances, il se décrochait rapidement pour mener 3-0, break confirmé. Dès lors, le public guettait la réponse de l’octuple tenant du titre. Mais voilà, celle-ci n’allait pas intervenir. Mal à l’aise, Nadal ne faisait guère impression. Ses appuis se voulaient hésitants, ses courses moins fluides et ses coups moins précis. Résultat, la balle de l’Espagnol ne giclait pas ou trop peu. Or, si ce niveau de jeu aurait certainement suffit pour désarmer des adversaires émargeant au-delà du Top 8, face à Djokovic, il allait se révéler bien insuffisant. Incapable de déstabiliser et de bousculer son opposant, le Majorquin ne parvenait pas non plus à adapter sa tactique. Enfermer dans ses schémas et pilonnant le revers serbe, il finissait par se faire contrer et en payait les conséquences. Largement supérieur, Djokovic s’emparait, pour la deuxième fois, de son engagement. On crut dès lors que Nadal allait concéder le set sans inscrire le moindre jeu d’autant qu’il se retrouvait mener 5-0 15-40 sur son service. Mais l’homme est un guerrier inlassable. A l’orgueil et s’appuyant sur une bonne première balle, il renversait la situation et remportait son premier jeu. Sur sa lancée, il débreakait une première fois avant de céder. Laissant passer l’orage, Djokovic bouclait la première manche (6-2).

    Histoire d’orgueil

    Djokovic monte carlo

    Devant une assistance partagée entre l’étonnement frigorifique et une joie ensoleillée, le n°1 mondial tenait entre ses mains le destin de ce match. De retour sur le court, le niveau de jeu s’élevait. En effet, plus en jambes, Nadal rendait, enfin, les coups de Djokovic. Aussitôt, un véritable combat s’instaura entre les deux hommes. Plus intense, Nadal était le premier à faire la différence dans cette seconde manche. Au 6ème jeu, l’Espagnol se révoltait et acculait son rival. Profitant de son ascendant et des fautes serbes, il lui dérobait son service (4-2). Mais Novak Djokovic n’est pas un joueur lambda. Avec son exceptionnelle couverture de terrain et ce redoutable revers long de ligne, il refaisait son retard. Vint alors le 10ème jeu. A 5-5, l’actuel patron du circuit ATP servait pour reprendre les rênes du set. Ce fut l’instant choisi par Nadal pour asséner une nouvelle charge. A défaut d’avoir retrouvé la toute puissance qui était la sienne avant ses problèmes aux genoux et son absence (ndlr : il a été écarté du circuit durant près de 7 mois entre juillet l’année dernière et mars dernier), il conservait son extraordinaire force de caractère. Augmentant encore son engagement, le taureau de Manacor écornait le volatile serbe et s’octroyait la possibilité de glaner la deuxième manche sur son service. Mais voilà, Nadal n’a pas le panache de l’orgueil. Fier champion parmi les champions, Djokovic en regorge et refusait d’abdiquer devant la violence espagnole. Dos au mur, il se sublimait, réajustait son revers. En d’autres temps, cela n’aurait pas suffit mais ici, il s’offrait le tie-break. Sans doute sonné par la réaction, Nadal accusait le coup et cédait par deux fois. Serein, Djokovic se saisissait de l’occasion et resserra l’étreinte. Enserré, le taureau de Manacor abdiquait finalement devant l’emprise de ce rapace implacable. Comme à Rome ou Madrid en 2011, le Serbe soumettait son rival espagnol sur l’ocre du tennis. Mieux encore, il le réduisait au silence en son antre, dans cette arène où seul Guillermo Coria était parvenu à le battre… alors qu’il n’avait que 16 ans. C’était en 2003, une autre époque, avant qu’il ne devienne le plus grand joueur de terre battue de tous les temps.

    Dépossédé de son bien, Rafael Nadal sait l’étendu du chemin qui le sépare encore du sommet. Aussi travaillera-t-il pour être prêt à l’heure du rendez-vous de la Porte d’Auteuil. Du côté de Novak Djokovic, la voie se dessine. Déjà résident monégasque, le n°1 mondial vient d’acter l’extension de son royaume et d’annexer un auguste Rocher à son lieu de villégiature. Qu’on se le dise, l’aigle royal serbe s’est niché en principauté et entend bien y régner pour de nombreuses années.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Paire Miami

    Alors que le tennis français dispose de toutes les armes pour imposer le respect, ce dernier en a décidé autrement. Plutôt que de chercher la voie de l’excellence, il s’évertue à sombrer dans l’indigence, à l’image du duo Paire-Llodra ou de la brouillonne Bartoli.

    Paire

    Il faudra donc encore attendre pour assister au printemps du tennis tricolore. Alors que le soleil transperce petit à petit le lourd manteau nuageux qui avait recouvert le ciel durant l’hiver et que les fleurs commencent à s’éveiller, les représentants du tennis français ont semble-t-il décider de retarder quelque peu l’embellie. En effet, à Miami, trois d’entre eux ont jeté un voile ténébreux et nauséabond sur sa situation. Même si les cas de figure et les raisons divergent, l’effet n’en demeure pas moins identique.

    Les vacances scolaires viennent de s’achever alors Benoît Paire et Michael Llodra ont décidé de faire comme les enfants et de se chamailler. S’ils se sont bien retrouvés face à face sur un court de tennis, leur opposition eut pourtant l’air d’une bagarre de court d’école aussi puérile que stupide. D’un côté le grand roublard qui se défend de tout, noble et vertueux (en apparence) et de l’autre le petit orgueilleux, impulsif et naïf. Une petite provocation du premier, une réplique du second et voilà, les éléments vous offrant un acte théâtrale ridiculement honteux. La scène a pour cadre le premier tour du Masters 1000 de Miami. Sur le court, Benoît Paire, espoir encore fragile du tennis français, rencontrait dans un choc des générations le vieux briscard Michael Llodra. Tout se déroulait sans encombre pour l’Avignonnais qui parvenait à s’emparer du service de son adversaire pour mener 3-0 au changement de côté. Ce fut à cet instant précis que le match dérapa et que le ton monta entre les deux opposants. Croisant son cadet, Llodra lui adressa une petite remontrance, un conseil si l’on en croit sa version. « Ne commence pas à mettre la pression sur l’arbitre (référence à une annonce tardive du juge arbitre sur une double faute de Llodra à 1-0, 30-0, suite à laquelle Paire s’était fendu d’un geste d’agacement). Ne te comporte pas comme un petit merdeux, comme contre Gilles (Simon à Indian Wells). » relate le Parisien. Des propos que n’a guère goutés Benoît Paire qui ne se faisait pas prier pour rembarrer son compatriote. « Je t’emmerde » aurait ainsi répliqué le 38ème joueur mondial selon Llodra (ndlr : d’autres sources indiquent que les termes du natif d’Avignon auraient été : « mange-merde »). Ce dernier poursuit son plaidoyer. « Mon idée était de calmer le truc tout de suite. Ce n’était pas insulte. Jamais, je ne lui ai dit qu’il était un petit merdeux. » assure-t-il. Des propos contradictoires qui cachent sans doute autre chose.

    « C’est quelqu’un de faux »

    llodra

    En effet, Michael Llodra, quoiqu’il en dise, n’est pas né de la dernière pluie et s’avère rompu à ses jeux de dupes qui prennent tournure sur les courts du monde entier. A 32 ans, il sait qu’un match se gagne autant dans la tête qu’avec une raquette à la main. Aussi, il n’est pas sans connaître la friabilité du mental d’un joueur comme Paire, sujet à de (trop ?) nombreux accès de colère à la moindre contrariété. Dès lors, il paraît évident pour le protégé de Laurent Zimbler qu’il s’agissait d’une tactique de la part du 65ème joueur mondial. « Il m'a clairement et sciemment insulté, en me traitant de pleureuse et de petit merdeux (…) Ce n'est pas quelqu'un de bien. C'est quelqu'un de faux qui est prêt à tout pour gagner un match. » assure Paire. Ce dernier avait d’ailleurs du mal à comprendre l’attitude qui fut celle de son aîné durant l’ensemble de la rencontre. Car cet accrochage allait trouver son prolongement tout au long de la partie. « Dès que je lui demandais des explications, il me répondait : ‘’Ferme ta gueule, j'ai huit ans de plus que toi, tu me dois le respect’’. Je ne suis pas son chien, il n'a pas à me parler comme ça. C'est inacceptable. » enrage-t-il. Malheureusement pour lui, le piège tendu par son adversaire va se refermer sur lui. Perturbé, Paire va peu à peu perdre le fil d’un match qu’il maitrisait jusqu’à 4-1 en sa faveur. Gangréné par les propos et l’attitude de son adversaire du jour, il le voyait finalement lui subtiliser la première manche dans un tie-break où il eut pourtant 5 chances de conclure. Llodra venait de réussir son coup d’autant que le second set allait se transformer en une tranquille promenade, Paire se désintégrant. Après 1h12 de supplice, Paire abdiquait (6-7 2-6), s’en allait serrer la main de l’arbitre avant d’oublier sciemment de saluer Llodra et de quitter le court sous les huées d’une foule incrédule. Ne décolérant pas, Paire se fendra d’une dernière saillie « C’est pas compliqué, je ne lui parlerais plus jamais. » avant que Llodra ne clôt les hostilités. « Dans des matches comme ça, il a deux solutions : soit on se monte le bourrichon et ça devient n’importe quoi, soit on ferme sa gueule et on joue. Au bout du compte, c’est lui qui s’est ridiculisé. » Fin de l’acte et certainement fin de l’histoire commune, si tenté qu’il n’y en ait jamais eu une. Fin aussi de la récréation pour une altercation aux airs de bêtise infantile.

    Paire-Llodra

    Bartoli en crise

    Si le roi de l’amortie dégoupillée et le dévoreur de filet (et d’esprit) se sont distingués de la plus mauvaise des façons sur le court, ils ne sont pas les seuls à avoir terni l’image du tennis français en Floride. Dans un tout autre style, Marion Martoli n’a même pas eu besoin de se donner en spectacle sur un court pour attirer l’attention. Au début du mois, la numéro 1 française prenait son courage à deux mains et convoquait la presse pour annoncer qu’elle se séparait définitivement de son père et entraîneur Walter. Une révolution dans le petit monde des Bartoli tant l’association entre le père et sa fille paraissait pouvoir résister à toutes les tempêtes. Mais voilà, la Française rêvait de retrouver l’équipe de France de Fed Cup (ndlr : Bartoli ne jouait plus pour son pays depuis de nombreuses années en raison de ses exigences et de sa volonté de voir son père l’accompagner à chaque rassemblement, donnée incompatible avec le fonctionnement interne de l’équipe nationale). 

    Bartoli flou

    Plus encore, la finaliste de Wimbledon 2007 souhaitait continuer à s’améliorer et jugeait qu’elle était allée au bout du processus avec son géniteur. Forte de ce constat, elle choisissait de s’attacher les services d’une ancienne référence du circuit féminin, la Tchèque Jana Novotna, lauréate de Wimbledon en 1998 et d’une obscure polonaise nommée Iwona Kuczynska. Objectif clairement annoncé : améliorer le jeu d’attaque de la 11ème joueuse mondiale en travaillant sur sa mobilité et sa volée. Observatrice avisée du circuit WTA, Martina Navratilova (59 titres du Grand Chelem dont 18 en simple) se réjouissait de cette nouvelle association et prédisait même que Bartoli pourrait à terme titiller le Top 5 mondial.

    Tout semblait parfaitement s’imbriquer donc pour ce qui s’apparentait à une seconde carrière. Toutefois, Marion Bartoli semble vivre à 28 ans sa crise d’adolescence ou tout du moins une crise identitaire. Sans raison valable (de l’extérieur), elle vient de congédier le duo Novotna-Kuczynska. C’est donc seule, car son père qui était avec elle jusqu’à hier, a quitté Miami, que la quart de finaliste du dernier US Open abordera ce Masters 1000. « Marion cherche sa structure. » plaide la responsable du haut niveau féminin Alexandra Fusai. Pas idéal à l’heure d’affronter Andrea Petkovic.

    Entre deux gamins se chamaillant sous le soleil et une jeune femme en quête de repère, l’escapade floridienne du tennis français tourne au fiasco. A leurs compatriotes de relever le niveau et de mprouver que le tennis français vaut mieux qu'une colonie d'écoliers.

    Christopher Buet


    votre commentaire
  • Nadal indian Wells

    Pour son retour à la compétition (en Masters 1000), Rafael Nadal n’a pas tardé à faire parler de lui. S’il a repris ses bonnes habitudes en passant les deux premiers tours d’Indian Wells, le Majorquin s’est distingué en écharpant l’ATP, dont il ne goûte guère les nouvelles règles.

    « Un désastre », Rafael Nadal n’a pas mâché ses mots pour son grand retour sur le circuit ATP. Profitant de la grande caisse de résonance que confère un Masters 1000 (ndlr : Nadal a repris le chemin des tournois depuis quelques semaines et l’accessit de Vina del Mar en Amérique du Sud), le Taureau de Manacor n’a pas manqué d’asséner un violent coup de corne aux décideurs du circuit. Le courroux du joueur ibérique trouve son origine dans l’une des nouvelles règles qui est venue garnir le règlement. Durant l’absence de l’ancien n°1 mondial, les instances régissant le tennis mondial ont choisi pour fluidifier le jeu et surtout garantir un rythme plus soutenu, de limiter le temps dont dispose les joueurs avant de servir. Une règle répondant au mécontentement d’une large frange de joueurs lassée des libertés prises par certains de leurs pairs. Pour mémoire, la mythique finale de l’Open d’Australie 2012 qui avait opposé Rafael Nadal à Novak Djokovic durant 5 heures et 53 minutes avait atteint un summum de pesanteur. D’après certains observateurs, les deux hommes auraient passé près d’une heure entre les points donc au moment des services, un temps considérable.

    Pas étonnant dès lors de voir l’Espagnol s’offusquer de se changement de réglementation, intervenu qui plus est lorsqu’il était contraint de vivre loin des courts. Pas étonnant non plus, dans la mesure où l’ogre de l’ocre a toujours défendu ses positions et ses convictions. A la différence d’un Roger Federer décrié pour son attitude trop neutre, sa Majesté demeure Suisse après tout, Nadal ne s’est jamais démonté. A Indian Wells, celui qui a quitté las le « complaisant » conseil des joueurs dont il était le vice-président n’a donc pas manqué de dire le fond de sa pensée. Pour lui, cette nouvelle réglementation va tout simplement à l’encontre du tennis et du spectacle. « Dans des pays comme le Chili, le Brésil ou le 

    Berdych IW

    Mexique, c’est un désastre. Cette règle est carrément dirigée contre les échanges spectaculaires. Moi quand je revois à la télé les meilleurs points d’une saison, je n’y vois jamais un seul ace. Les grands points sont souvent de longs échanges. Avec la nouvelle règle des 25 secondes, il n’y a aucune chance pour pouvoir récupérer d’un échange à rallonge. Je vous invite à regarder le troisième set de ma finale de l’US Open en 2011, et me dire si la foule était contente de ce qui se passait sur le court. Avec cette nouvelle règle, on ne reverra jamais plus un set pareil. (ndlr : Mené 2 sets à 0, Nadal avait livré une troisième manche titanesque, parvenant à renverser Djokovic lors d’échanges irréels et d’une longueur insensée. Malgré ce sursaut d’orgueil, il avait finit par s’incliner en 4 actes au terme d’une finale à l’intensité prodigieuse longue de plus de 4h) » s’insurge le cinquième joueur mondial. Nadal n’est pas le seul joueur à dénoncer ce nouveau point de règlement. En début d’année, Tomas Berdych a manifesté sa désapprobation. « J'ai fait l'amer expérience de la règle à Chennai (...). Je ne vois pas de bonne raison qui pourrait la justifier. Quand il fait chaud, c'est presque impossible de respecter ces 25 secondes (...). Toutes les habitudes qu'on avait depuis toujours sont balayées en une seule décision. », s’est plaint le Tchèque mécanique, au jeu robotique, strictement réglé.

    « C'est cool d'avoir moins de temps pour récupérer »

    Nadal IW

    Si Rafael Nadal a pris la tête des mécontents, nombre de joueurs n’adhèrent pas au mouvement de fronde. Au contraire, certains comme Gaël Monfils voient en cette initiative de l’ATP, une excellente chose. « Je l'aime bien, parce que je suis un joueur qui joue beaucoup sur son physique. Pour moi, c'est cool d'avoir moins de temps pour récupérer, j'en suis content. Je serais même plus content si ce n'était que dix secondes, même, parce que je ne connais pas beaucoup de joueurs qui seraient capables de courir, puis récupérer en dix secondes. Je serais l'un des meilleurs dans cette situation, à mon avis. » apprécie le Français. Membre du conseil des joueurs, le Sud-Africain Kevin Anderson se montre plus nuancer dans son analyse. « Vous devez parfois prendre en considération quelques circonstances atténuantes. Si vous jouez un point incroyablement long par exemple. Il faut que ce soit juste pour tout le monde. Mais j'ai entendu dire de la part d'autres gars que c'est un peu laxiste comme règle. » temporise le tombeur de David Ferrer dans le désert californien. Une mesure que Monfils s’empresse d’apporter également. « Je pense que l'arbitre devrait malgré tout faire une différence entre le joueur qui prend du temps parce qu'il est fatigué et le joueur qui prend du temps à cause des ramasseurs de balle ou quelque chose comme ça. » nuance le Parisien.

    Comme chaque nouveau règlement, celui-ci suscite la controverse et le débat. Un débat qui ne fait que commencer et qui assurément ne durera pas 25 secondes. Une chose est sûre, le Taureau de Manacor a beau se plaindre, il n’en perd pas moins ses moyens. Au premier tour, il s’est rassuré pour son retour sur dur. Un an après son dernier match sur cette surface (346 jours pour être exact), l’Espagnol a concassé le tendre Ryan Harrison (7-6 6-2). Exempt de troisième tour (forfait de Leonardo Mayer), Nadal retrouvera le déstabilisant Ernest Gulbis en huitième de finale. Après tant d’absence, nous en avions presque oublié la férocité de ses ambitions. Sa charge, tant dans l’arène qu’en dehors, ne fait que commencer et la terre se met déjà à trembler.

    Christopher Buet


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique