• Roland-Garros: Bleu de bonheur

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    Si les favoris n’ont pas tremblé, en cette deuxième journée, les Français ont également assuré. De Tsonga à Monfils en passant par Johansson, ils seront tous de la fête au second tour.

    Il est des victoires qui se savourent plus que d’autres, des succès dont la saveur reste longtemps en bouche et dont les vertus se délectent avec une jouissance presque coupable. Le match remporté par Gael Monfils est de cette sorte là et parce que l’adversaire était ce colosse au visage mécanique et au jeu aussi froid que le vent qui pétrifiait les frêles feuilles vertes ornant les arbres chancelant des allées de Roland Garros. Plus que l’adversaire, il fallait, hier, retenir la manière avec laquelle Monfils s’était battue sur sa terre. Car plus que tout autre, l’ancien septième mondial est chez lui dans l’enceinte exigüe et connaisseuse du Majeur parisien.

    Monfils maltraite Berdych

    f_27-05-Monfils-Gael-01Après des mois de galère, de blessures en série finissant d’installer une instabilité chronique autour de lui, l’actuel 81ème à l’ATP n’avait pas hérité d’un retour aisée Porte d’Auteuil. En effet, vendredi, le sort l’offrait à Tomas Berdych, certainement aussi content de devoir affronter Monfils que l’inverse. Un premier tour en forme de cauchemar face à ce frappeur silencieux et méthodique. Mais qu’importe, le Parisien n’avait cure.

    A présent sans entraîneur depuis sa rupture d’avec Patrick Chamagne et son éphémère, presque illusionnée, association avec Eric Winogradsky, Monfils ne souhaitait que jouer, accumuler les matches et se faire plaisir. Surfant sur les 10 succès en 11 matches accumulés depuis deux semaines, le demi-finaliste 2008 se mettait le premier en évidence. Bien en jambe, il parvenait à contrer la puissance du Tchèque et à exister. Mieux poussant jusqu’au tie-break, il se payait le luxe de faire plier son adversaire, impuissant devant le brio et l’énergie déployée par le tricolore en défense. Ce dernier en remettait même une couche. Servant le plomb, il n’allait pratiquement pas concéder le moindre point sur sa mise en jeu dans le second set, tout en s’emparant d’une des mises en jeux adverse. Après un peu plus d’heure et demie, Monfils menait deux manches à zéro sans que personne n’y trouve rien à redire (7-6 6-4).

    Au bout de lui-même

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    Sans solution, Berdych aurait pu se frustrer et s’énerver mais le 6ème joueur mondial ne broncha pas. Avec calme, il poursuivait son entreprise et continuait de frapper fort. Une tactique payante puisque (presque) logiquement Monfils s’affaissa. Plus habitué à jouer des matches de cette intensité, le Français accusait le coup physiquement et se faisait enfoncer par la violence des attaques tchèques. Même s’il parvenait à rester dans le match grâce à son service (plus de 75% de première balle et 26 aces), il s’inclinait par deux fois au tie-break et voyait le Tchèque revenir à sa hauteur.

    Beaucoup crurent alors que la chance de Monfils était passée, d’autant qu’il n’était passé qu’à deux points du match en toute fin de 4ème manche. Que nenni. « La Monf » a de la ressource et sait se sublimer devant ce public, vibrant à l’unisson de son champion. A bout de force, il ne tenait plus que grâce à la fureur des cris de la foule quand Berdych luttait également contre sa lourde et douloureuse carcasse. Vint alors ce neuvième jeu. Moins impérial au service, le vainqueur de la Coupe Davis expédiait une vilaine volée dans le cœur du filet et concédait sa mise en jeu ainsi que le match. Ne se faisant pas prier, Monfils se saisissait du cadeau et l’offrait aux spectateurs enfiévrés du Philippe Chatrier. Après 4h03 d’un intense combat, il finissait par croquer son adversaire (7-6 6-4 6-7 6-7 7-5). « C'est un moment unique. Il y a longtemps que je n'avais pas gagné de grand match comme celui-là, en me dépassant physiquement et mentalement. Cela fait super plaisir. C'est une victoire différente de celles que j'ai pu connaître ici par le passé. Un de mes plus beaux matchs à Roland-Garros », goûtait-il avec délectation.

    Un savoureux succès qui ouvre donc son tableau mais qu’il va vite devoir digérer. En effet, au tour suivant, le menu s’annonce tout aussi épicé avec un joueur aux frappes aussi sourdes que sauvages, le Letton Ernests Gulbis, sorte de Berdych sensible et fantasque.

    Gasquet et Tsonga déroulent

    f_27-05-Gasquet-Richard-04« J'ai envie de bien faire ici... Je ne me mets pas de pression excessive. J'ai juste envie de bien faire, de faire un gros tournoi. » Le discours de Richard Gasquet a le mérite de refléter ce qu’il proposa sur le court, une prestation sobre et maîtrisée émaillée de quelques fulgurances dont le chef Gasquet a le secret (6-1 6-4 6-3 en 1h31). En cette année 2013, le joueur peureux et malhabile qui s’était perdu dans les tourments d’une réputation d’artiste a laissé place à un soliste fiable. Sa partition retrouvée, celui qui fut surnommé le « Petit Mozart » du tennis laisse de nouveau libre cours à ses élans créatifs. A voir la mine déconfite d’Igor Stakhovsky, qui se signala en allant prendre une photo d’une trace avec son téléphone portable, contestant une décision de l’arbitre de chaise, le morceau joué par Gasquet a du peps. « C'est vraiment un plaisir d'être ici, et je sais que le public est avec moi. À moi de tout donner, on verra jusqu'où ça me mènera », a conclu le Biterrois.

    Dans un autre style, et une sonorité plus fracassante, Jo Wilfried Tsonga n’a pas manqué ses retrouvailles avec la terre battue parisienne. Un an après l’homérique quart de finale qui le vit sous une pluie circonstancielle s’incliner face au rapace serbe Novak Djokovic, le Manceau a assuré le service minimum. Plus puissant et plus percutant que le modeste slovène Aljad Bedene, et malgré un service défaillant (50% de première balle), le n°1 français a réglé l’affaire en 1h47 et trois petits sets (6-2 6-2 6-3).

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    Si on avait espéré des retrouvailles au second tour avec Paul-Henri Mathieu dans un duel fratricide mais forcément réjouissant, ce dernier n’a pas rempli sa part du contrat. La faute à Jarko Nieminen. Poussant le vice jusqu’à disputer à nouveau cinq sets Porte d’Auteuil, il ne faut pas bouder son plaisir quand on joue un Majeur à la maison, Mathieu a fini par craquer. Brillant de vaillance, à défaut d’excellence tennistique, le Français a payé cher son modèle réactif. Toujours mené au score, il a fini par s’épuiser avant de céder logiquement devant le Finlandais au cours de la cinquième et dernière manche (6-4 4-6 6-4 6-7 6-2 en 3h42). L’aventure 2013 s’arrête donc dès le premier tour pour l’homme aux matches à rallonge. L’an dernier déjà, il avait passé près de 13 heures sur les courts en 3 matches, dont 5h40  contre le seul John Isner.

    Mathilde Johansson rayonne

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    f_27-05-Johansson-Mathilde-02Plus chanceux que PHM, Julien Benneteau a mieux négocié son entrée en lice, en parvenant à effacer le Lituanien Berankis en 4 sets (7-6 6-3 5-7 7-6). Une victoire qui laissait un goût légèrement amer au Bressan qui aurait préféré (et pu) boucler le match plus vite. Une économie non négligeable quand se profile dès le 3ème tour un affrontement avec Roger Federer. Bien rentré également dans son tournoi, Edouard Roger-Vasselin. A 29 ans et pour son cinquième Roland Garros, il fit preuve d’une grande aisance dans l’échange. Bien en place, il ne laissait pas respirer l’argentin Alund pour composter son billet en 2h10 (6-2 4-6 6-1 6-0). Au tour suivant, les données de l’équation seront différentes puisqu’il faudra se défaire de Nicolas Almagro (n°11)

    Du côté des filles, le ciel se veut éclatant pour Mathilde Johansson. Entreprenante, elle a parfaitement manœuvré contre la sud-africaine Scheepers (7-5 6-1) pour s’offrir le droit de défier Ana Ivanovic, impeccable la veille. Un succès après lequel court désespérément Pauline Parmentier depuis janvier dernier. S’en ressentant toujours de son épaule, elle a été balayée par la slovaque Rybarikova (6-0 6-1).

    Entre l’exploit de Gaël Monfils, les belles performances de Roger Vasselin et Johansson et les rentrées sereines des Gasquet, Benneteau et autre Tsonga, le tennis tricolore entame bien ce Roland Garros.

    Hier, alors le ciel clément avait laissé entrevoir de belles éclaircies et de larges trouées azurées, la terre ocre avait une fausse teinte bleutée.

    Christopher Buet


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