• À la lumière d'une ombre

    Wawrinka et Federer posent avec leurs trophées
    Plus consistant que son illustre compatriote, Stanislas Wawrinka s’est hissé sur le Rocher monégasque pour s’emparer de son premier titre en Masters 1 000 au bout de 2h14 de jeu (4-6 7-6 6-2). Le Vaudois a bien sa place au sommet du jeu en cette année 2014.

    Wawrinka triomphe

    L’image est aussi saisissante qu’évocatrice. Le soleil a percé depuis maintenant plusieurs minutes et illumine le central de Monte Carlo. Pourtant une ombre demeure, enveloppant un Roger Federer en plein délitement. Au changement de côté, assis sur sa chaise, le Bâlois baigne dans les ténèbres. À quelques mètres de là, de l’autre côté du terrain, Stanislas Wawrinka irradie dans la lumière de l’astre de vie. L’ombre et la lumière, le vaincu et le vainqueur. Avant même la fin du combat, le ciel avait compris, compris que le Vaudois n’allait pas défaillir face à son adversaire et néanmoins auguste ami, compris que Federer ne renverserait pas la situation. Il ne fallait qu’une poignée de minutes à l’homme de Lausanne pour faire sens au dessin astral. Sur une ultime attaque de coup droit dans la diagonale accrochant la ligne, Wawrinka mettait hors de position son adversaire et remportait le Masters 1 000 de Monte Carlo, le premier de sa carrière. « Après la Coupe Davis, j'avais à cœur de bien faire, et j'ai vraiment fait du super boulot cette semaine de ce point de vue. Je suis très content de gagner mon premier Masters 1000 aussi rapidement après mon premier Grand Chelem », assurait le lauréat du dernier Open d’Australie dont la joie rentrée témoignait mal de la portée de sa victoire. Une victoire qu’il a dû aller chercher au plus profond de lui tant son entame fut laborieuse.

    Federer en pleine lumière

    Federer maîtrise le premier set

    Impressionnant la veille face à David Ferrer, Stanislas Wawrinka peinait à entrer dans son match. « On était tous les deux très nerveux au début. On se regardait beaucoup, on avait du mal à bien bouger », reconnaissait-il. « Cette finale est vraiment spéciale », promettait Federer dans la presse dimanche matin. Le genre d’événement qui transcende l’ancien n°1 mondial qui avait pris part à la dernière finale 100 % suisse du circuit en 2000 à Marseille face à Marc Rosset. Et comme à l’époque, le Bâlois prenait le meilleur départ. D’entrée, il mettait la pression sur son compatriote et obtenait une balle de break. S’il ne parvenait pas à la convertir, un vice qui avait failli lui jouer des tours en quart de finale contre Jo-Wilfried Tsonga, Federer montrait qu’il n’allait laisser aucun répit à son adversaire. Le tournant du set intervint au 4ème jeu. En position très favorable à l’échange, Stanislas Wawrinka bénéficie d’une ouverture sur l’engagement bâlois mais la râte par laxisme et manque de conviction, poussant sa balle hors des limites du court. Le Vaudois se tape la tête contre son tamis. Il sait qu’il vient de galvauder une occasion en or. Il allait s’en vouloir d’autant plus que Federer accélérait dès le jeu suivant. Opportuniste, il subtilisait l’engagement de Wawrinka, un exploit inédit depuis le début de la semaine à Monte Carlo (3-2).

    Sous le ciel morose et dans la fraicheur monégasque, Roger Federer venait de faire basculer le sort de cette première manche et ne cèderait plus. Au terme d’un premier acte bien maîtrisé où il se sera montré très offensif, sa Majesté prenait les devants (6-4) quand son « vassal » ruminait ses inconstances (17 fautes directes, ndlr).

    Stanislas Wawrinka ne désarme pas

    L’ombre d’un doute

    Cette finale paresseuse gagnait en intérêt à l’aune de son deuxième acte. En effet, loin d’afficher toute la sérénité nécessaire au contrôle de pareil événement, Federer baissait de rythme et en payait les conséquences, concédant le break (0-2). Un avantage éphémère puisqu’il réagissait dans la foulée. Usant davantage de son revers slicé pour varier le rythme des échanges et dérégler les frappes adverses, l’ancien n°1 mondial prenait une nouvelle fois la mise en jeu vaudoise avant d’écarter 2 nouvelles balles de break.

    Alors que la pluie faisait son apparition et interrompait très légèrement le match, les deux hommes venaient réellement d’entamer cette finale. Dès lors, aucun d’eux ne lâchera plus rien. Si Wawrinka impose sa puissance au service, Federer gagne avec à propos le filet où il se montre particulièrement incisif. C’est donc au tie-break que le sort de cette manche allait se jouer. Un exercice où le nouveau maître de Melbourne allait se montrer plus habile. « Je suis très content d’avoir su réagir au deuxième set, d’avoir su imposer mon rythme au jeu. J’ai très bien négocié le tie-break, je suis allé le chercher en étant très agressif, en servant fort », appréciait le 3ème joueur mondial qui pas forcément très bon a su ne pas céder à la frustration pour s’offrir un 3ème et dernier set (7-6).

    « Des émotions incroyables »

    Wawrinka enfonce son adversaire

    Sans le savoir, le public venait d’assister au basculement de la rencontre. Si le temps se découvrait et les rayons du soleil perçaient la couverture nuageuse pour illuminer le Rocher princier, Roger Federer voyait son ciel s’obscurcir. Comme touché par la perte de ce tie-break, il déclina, ses déplacements se faisant moins fluides et ses gestes moins précis. Une baisse de régime que ne manqua pas de punir un Wawrinka libéré. « Stan jouait plus dur à la fin. Je pense qu'il l'a en fait mérité un peu plus », admettait Federer. S’appuyant sur sa puissance et la lourdeur de ces frappes, le Vaudois, qui adore cette terre ocre où son jeu répond si bien, rouait de coup son illustre aîné au point de lui arracher deux fois sa mise en jeu pour se détacher 4-0. La finale était finie, Wawrinka venait de vaincre Federer, défait comme en 2000, et les quatre jeux suivants n’y changeraient rien. « Je suis en train de vivre des émotions incroyables. Gagner mon premier Masters 1000 en battant en plus Roger (Federer) en finale, c’est juste incroyable(…) J'ai explosé cette année toutes les barrières qui se dressaient devant moi, en jouant très bien. Je suis très heureux », savourait Stanislas Wawrinka. Après l’Open d’Australie où il avait apposé son empreinte sur une Rod Laver Arena acquise à sa cause, il se hissait sur le Rocher princier en seigneur de l’ocre et du tennis suisse, sous les yeux de sa Majesté helvète. A l’ombre du « plus grand joueur de tous les temps », Wawrinka a su faire jaillir la lumière dans une année 2014 décidément radieuse.

    Christopher Buet


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